Snow patrol. [PV pour celui ou celle qui n'a rien d'important à faire.]

Bara ne savait pas vraiment ce qu'elle faisait là. Enfin, si, elle se promenait, mais pourquoi elle se promenait à cet endroit là, c'était un mystère. Elle n'avait rien de particuliers à faire en cet endroit, personne à rejoindre, personne pour l'accompagner dans sa marche et parler avec elle alors que ses bottes à talons s'enfonçaient dans la neige à chacun de ses pas. Il faisait froid, et elle était pbligée de resserrer ses bras sur sa poitrine si elle voulait conserver un semblant de chaleur. Pourtant, elle n'était pas habillée légèrement, l'écharpe et le long manteau de fourrure en témoignaient, mais l'atmosphère était décidément glacial, bien que le Printemps avait d'hors et déjà pointé le bout de son nez. Bara devait l'avouer, mais elle n'avait pas vu passer l'hiver, cette année-ci. Elle ne savait pas pourquoi, il y avait eu foule d'évènements marquants, et pourtant...Enfin, ce n'était pas comme si c'était intéréssant d'une quelconque manière, la façon dont-elle avait vu passer l'hiver, non?

Bara tappa légèrement du pied contre le sol recouvert de neige, poussant un petit soupir. Ses yeux violets se posèrent sur l'étendue enneigée, qui représentait d'une manière générale et néammoins plutôt juste l'état de toutes les campagnes d'Hatès. Quelle que soit la période de l'année, il y avait toujours cette couche de neige, plus ou moins épaisse selon la saison, qui recouvrait les paysages du 'pays' du nord de Lysandre. Seule la glace avait tendance à disparaître en cette saison et en été, dévoilant ainsi l'eau de quelques lacs et rivières. D'ailleurs, la surface de l'eau du lac du pendu devait sensiblement s'être dégelée, laissant apparaître une eau d'un beau bleu dans laquelle on ne pouvait malheureusement pas se baigner à moins de ne vouloir finir en stalagmite, bien évidemment. L'idée fit sourire la jeune fille, l'image d'un curieux se penchant un peu trop au bord du lac et finissant par y basculer, pour finalement réapparaître à la surface de l'eau en tant que stalagmite étant visiblement très drôle, plus qu'on aurait pu d'abord le penser. Bara était persuadée que même si quelqu'un tombait à l'eau devant ses yeux, elle rierait avant de l'aider, l'image lui revenant immédiatement en tête à ce moment. Enfin...Passé ce léger moment de rire, la jeune fille aux couettes vertes se dit que de toutes manières, il y avait peu de risques qu'une telle chose arrive devant elle. Il y avait peu d'idiots qui se penchaient au dessus des lacs à moitié dégêlés, alors pour qu'un le fasse juste à l'endroit où elle se promenait...

Cela relevait de l'impossible, presque. Ce n'était pas comme si c'était une scène à laquelle elle voulair assister en plus. Quelle importance cela avait?

Alors qu'elle arrivait en vue du lac du pendu, la jeune Noble cru voir une silhouette se déplacer sur la berge, s'éloignant pas à pas d'elle plus elle s'en rapprochait. Fronçant ses minces sourcils, intriguée, Bara Bellanca continua sa marche solitaire, tenant à savoir qui pouvait bien se ballader près du lac à une heure si matinale. Un promeneur, un soldat, un détraqué? Les trois? Elle verrait bien en s'approchant de la dite personne. Elle n'avait pas peur alors qu'elle s'approchait, elle était loin d'être sans défense, et si l'endurance lui faisait cruellement défaut, elle pouvait donner des coups violents afin de fragiliser son adversaire. Avec un tibia en morceaux, il ne pourrait pas la courser si elle s'échappait, qui qu'il soit. Elle ne pensait pas de toutes façons que cette personne l'attaquerait, elle ne se sentait étrangement pas en danger. Arrivée près de l'inconnu, elle se rendit compte que ce dernier s'était immobilisé et lui tournait le dos. Elle pu apercevoir une masse de cheveux roux qui ne semblaient pas avoir été coiffés se détacher de la silhouette aux tons sombres. Penchant sa tête sur le côté, Bara continua d'observer l'inconnu avancer, puis reculer, comme s'il hésitait à aller plus loin. Ces cheveux lui rapellaient quelque chose, elle était sûre d'avoir déjà vu cette coiffure par le passé. Mais qui en était le porteur, ça, elle n'aurait su le dire. Peut-être que si elle voyait son visage...?

La Princesse du Royaume du froid s'avança encore, jusqu'à se retrouver à quelques mètres à peine du garçon roux. Elle toussota deux trois fois, annonçant par ce simple geste sa présence:

"A quoi jouez vous exactement?"

Clairement, cela l'intriguait. Que faisait-il là, pourquoi avait-il reculé et avancé? Recroisant ses bras sur sa fine poitrine, elle attendit là, debout dans la neige, que l'inconnu se retourne et lui réponde. Sérieusement, ces cheveux lui disaient quelque chose, mais quoi? Cela énervait Bara, qui se mordit légèrement la lèvre inférieure. Se souvenir uniquement d'une coiffure, non mais vraiment...

[Je sens comme un regard inquiet braqué sur Claid, guettant dans l'ombre... XD]


Le fait que Claid sache maintenant avec certitude qu'il n'était pas seul ici lui fit froncer les sourcils. Bien sûr, il n'était pas stupide au point de s'énerver sur la première personne qui avait eu l'idée de venir se promener dans l'endroit où il se trouvait à ce moment précis, encore heureux. Sa réaction était juste un reflex, ce n'est pas comme si il était fou de joie à l'idée que sa solitude ait été brisé. En fait oui, jusque là, il ne demandait la compagnie de personne, pour une fois. Son mécontentement ne pouvait, ou plutôt ne 'devait', durer plus longtemps qu'une fraction de seconde. Les soldats n'étaient pas spécialement connus pour leur politesse sans faille, mais cette situation n'avait rien à voire avec le travail de son point de vue. Être agréable avec les autres était tout simplement une question de principe. Aussi, il se sentait obligé de faire un effort, et il savait parfaitement que ça ne le tuerait pas à la tâche.
La personne derrière lui semblait s'être arrêtée à quelques pas de lui, voulant annoncer sa présence par un toussotement tout à fait souhaité. Moui, au moins, Claid était sûr qu'on s'adressait à lui, il ne pouvait pas jouer au sourd.

"À quoi jouez vous exactement?"

Une voix clairement féminine, autoritaire avec tout de même de la curiosité, et avec une impression de 'déjà-entendu'. La bouche du soldat forma une ligne droite à l'attente de cette question pourtant toute simple. Et lui qui pensait être passer inaperçu, dans un lieu qui avait l'air tout à fait désert, le voilà qu'il devait une explication maintenant... Aussi, son visage crispé se transforma sans peine en un sourire plus ou moins faussement ravi pour ne pas paraître ingrat. Toutefois, une fois qu'il eu fait crissé la neige sous ses bottes pour faire un tour sur lui-même et être fasse à son interlocutrice, ce même sourire s'évanouit immédiatement sous l'effet de l'étonnement. Son cœur fit un bond dans sa poitrine, qui lui fit remonté un hoquet de surprise. Sa pupille se rétracta, fixant alors Bara Bellanca sans vraiment savoir si il s'agissait d'un rêve ou d'une réalité. Il cligna plusieurs fois avant de remuer doucement la tête. Déjà qu'il ne s'attendait pas à rencontrer quelqu'un ici à cette heure là, il s'entendait encore moins à y rencontrer la princesse de son royaume. Les chances de probabilités étaient tellement faibles, voire inexistantes... Il n'en revenait tout simplement pas. Sans réfléchir, il supprima les quelques mètres qui les séparaient, tout sourire, avant de se raviser et de s'arrêter brutalement, donnant forme à une minuscule vague de poudreuse.
D'accord, il était plus heureux que triste de la revoir, à n'en point douter, mais il repensa aussitôt qu'il n'avait pas affaire à n'importe qui. Leur toute première rencontre avait déjà été assez inoubliable dans le genre raté, et même si ils ne devaient échangés que quelques mots, il serait bien que cela se passe sans réels problèmes. Il n'était qu'un insignifiant petit soldats parmi tant d'autres, les princesses des contrées glacées, il n'y en avait qu'une seule dans tout Lysandre, autant dire qu'il y avait une grosse différence qui les séparaient. Aussi, il calma immédiatement sa joie. Décidément, il devait être désagréable que tout le monde se comporte de manière aussi répétitive et ennuyante avec vous, mais ce n'était pas lui qui allait y changer quelque chose. Personne n'avait réellement le choix, dans les deux cas, on risquer d'offenser. On ne supprimait pas des codes respectaient depuis des siècles comme ça, sous le coup de la sympathie que l'on éprouve, sauf exception. Et Claid n'était pas une exception, il ne faisait ni parti de la famille royale, ni de ses amis proches donc... Et puis, si il faut, la jeune fille ne se rappelait déjà plus de lui. Leur rencontre datait d'y a quelques temps déjà, et oublier un visage vu une fois n'était pas si surprenant. C'était bien sûr différent pour le rouquin, qui pouvait se rappeler sans peine de la sœur de son dirigeant -il avait plutôt intérêt de toute façon- mais il ne s'attendait pas vraiment à ce que cette dernière se souvienne de lui. Sûr, ça le décevrait un peu, mais il ne serait pas vexé, il pouvait comprendre ça. Malgré tout cela, pas une seule fois, il n'avait songé à restait sourd à sa question. Peut-être que ce n'était pas ses affaires, qu'il n'avait pas envie d'être franc sur ce point là, qu'elle n'avait pas à le savoir et qu'il aurait pu tout simplement lui répondre 'mon travail', sans donner davantage de détails. Autant de possibilité qu'il n'y avait de réponse. Et pourtant, lui répondre de cette manière ne lui avait même pas effleuré l'esprit.

"Oh? Euhm... Bonjour." Dit-il avec un joyeux sourire, toutefois un peu gêné. "Je ne jouais pas, j'inspectais."

Nuance? Allez maintenant demander le sens premier du verbe 'inspecter' au jeune homme portant le cache-œil... Bien sûr, il avait hésité, mais c'était bel et bien ce qu'il faisait au départ, donc, cela ne sonnait pas comme un mensonge. Après, il devait bien avouer qu'il s'était égaré avec cette histoire de frontières invisibles... Bara avait bien sûr le droit d'insister si elle estimait que la réponse n'avait pas était assez claire, ou si elle n'était tout simplement pas à son goût. Aussi, le garçon à l'unique œil vert espérait quand même passer à autre chose. D'ailleurs la question qu'il se posa à son tour était bien 'que fait-elle ici?'. Sans se soucier du reste, il se pencha sur le côté et regarda par dessus l'épaule de sa cadette. Apparemment, elle avait l'air d'être venue seule, à moins que quelqu'un se cache dans les forêt environnantes pour guetter leurs moindres faits et gestes. Heureusement, Claid était loin d'être une personne paranoïaque, il ne cherchait pas les réponses là où il n'y en avait pas. Par contre, l'idée que la princesse d'Hatès sorte seule dans le froid mordant de ce royaume lui parut étrange. Elle avait l'air habillé plutôt chaudement, mais depuis que ce Keith lui avait expliqué en détail -si toutefois il ne lui avait pas mentit, et quel avantage il en aurait tiré de toutes façons?- le problème que le rouquin avait pris pour un simple coup de fatigue, il était resté sceptique sur plusieurs choses. Mais il n'allait pas aborder le sujet ici et maintenant. Parler de ça avec la concernée n'était pas la même chose... Sûrement même que tout le monde devait le savoir, mais qu'elle n'en parlait qu'avec son frère ou des personnes dans ce genre, en qui elle avait une confiance totale (sous-entendu le "Boulet Suprême" X'D). Le soldat n'avait pas la prétention de devenir le meilleur ami de la princesse pour apaiser sa curiosité, il se contenterait des rumeurs, qu'elles soient vraies ou fausses, qui circulent dans le château. Il ne tenait pas à lui montrer une certaine compassion, sans doute n'en avait-elle pas besoin, ou en possédait déjà trop... Personne ne souhaiter montrer ouvertement ses faiblesses à tout les gens qui passent, Claid en savait quelque chose. Aussi, il pensait qu'il était mieux de jouer les ignorants pour le moment, même si il se trompait peut-être.

"Arrêtez moi de suite si ça devient indiscret mais... Y a t-il une raison particulière à votre venue ici... Seule?" Demanda-t-il en haussant brièvement les épaules, moins crispé que la dernière fois qu'il l'avait vu.

Le dernier mot était parti tout seul et le possesseur du Maillet sut de suite que c'était une faute. Mais il n'y avait rien d'étrange à cela après tout. Ça faisait limite trop servile, mais cela était bel et bien ce que lui accordait son rang, renforcé par la fonction qu'il exerçait. Peut-être aussi que la jeune fille était venue ici dans le but d'y être seul ou de retrouver quelqu'un et dans les deux cas, Claid était au beau milieu de ses projets.

Bara attendait que le rouquin se retourne les bras croisés, l'air légèrement pincé, agacée par le froid qui la saisissait maintenant qu'elle était immobile et le temps que le jeune garçon prenait pour se retourner. L'avait-il entendue, au moins? La jeune fille aux couettes songea que oui, elle avait parlé trop fort pour qu'il ne l'ai pas entendue. Ou alors, c'était qu'il faisait la sourde oreille, ce qu'elle éspérait ardement qu'il ne ferait pas, elle en aurait été très véxée, et lui aurait sans doute expliquer sa manière de penser d'une manière fort peu cavalière. Bara Bellanca n'était pas quelqu'un qui aimait qu'on l'ignore et qui le faisait savoir. Un mauvais caractère, elle? Pas le moins du monde, elle savait ce qu'elle voulait, et savait le montrer. Fort heureusement, le rouquin se retourna, pivotant sur ses talons, faisant crisser la neige sous lui avant qu'elle n'arrive à s'énerver seule et sans raison apparente. Bien, plutôt heureusement pour le jeune homme, sur qui elle aurait sans doute injustement passé sa mauvaise humeur alors. Jeune homme qui, d'ailleurs, était visiblement surpris de la trouver là. La Princesse de la contrée du froid haussa un sourcil lorsque ce dernier secoua sa tête et se rapprocha d'elle, pour finalement s'arrêter à qelques mètres, comme s'il venait de se rendre compte de quelque chose. Le regard violet de la jeune fille ne quitta pas le visage du garçon, examinant ses traits alors qu'elle attendait qu'il hausse la voix. Son visage lui disait quelque chose, elle en était certaine. Elle avait déjà vu ce visage quelque part, elle en était sûre, sans pour autant réussir à mettre le doigt sur le quand et le où. Une pointe d'énervement illumina les yeux de la jeune fille aux couettes l'espace de quelques secondes. Ne pas se rapeller l'agaçait, mais elle ne le laissa pas plus paraître, il ne manquerait plus que le garçon le remarque et ne lui demande ce qui la tracassait autant. Croisant et décroisant ses bras afin de conserver la chaleur, Bara écouta le garçon finalement élevé la voix en silence, son regard toujours dirigé vers lui:

"Oh? Euhm... Bonjour. Je ne jouais pas, j'inspectais."

Il souriait. Un sourire à mi-chemin entre la gêne et la joie, la gêne d'avoir été ainsi surpris à faire quelque chose qui était selon elle tout sauf 'inspecter', et la joie de...la voir ici? Bara ne savait pas vraiment pourquoi le rouquin semblait si heureux, mais avec du recul, elle préférait ne pas le savoir. Elle s'en fichait un peu;, à vrai dire, le froid pouvait bien lui donner envie de sourire que ça ne la concernait pas le moins du monde. Elle se contenta de lâcher un petit 'Oh', penchant légèrement sa tête sur le côté, sans pour autant le quitter des yeux. Et si le fait qu'elle le regarde ainsi le gênait, c'était tant mieux. Gêner les personnes avec lesquelles elle parlait n'était pas quelque chose que Bara Bellanca se complaisait à faire, mais lorsqu'elle surprenait ces dites personnes en 'flagrant délit', elle devait avouer que les gêner encore plus était quelque chose qu'elle trouvait assez amusant. Exacerber la gêne et les faire se sentir encore plus coupables était un jeu amusant, bien que cruel pour celui en face d'elle. Mais elle s'en souciait peu, à partir du moment où elle n'était pas celle qui était gênée. La jeune fille aux longs cheveux décroisa ses bras, posant ses mains sur ses hanches alors qu'elle tentait encore de se rapeller du nom de ce garçon. Probablement devait-il travailler au château, et d'après le terme qu'il avait utilisé pour désigner son drôle de manège, il devait être un soldat. Un soldat roux et borgne, cela ne devait pas courire les rues, alors pourquoi était-elle incapable de se rapeller de son nom ou au moins où elle avait bien pu le voir en premier lieu? Cela commenceait à l'énerver prodigieusement, elle qui s'était vaguement dit au début que ce maudit nom lui reviendrait dans les minutes suivantes. Et bien, les minutes s'étaient écoulées et rien ne lui revenait pourtant. Qui cela n'aurait-il pas agacé?

Bara fut brutalement tirée de ses pensées par la voix du garçon, qui venait de reélever la voix, avec un bref haussement des épaules:

"Arrêtez moi de suite si ça devient indiscret mais... Y a t-il une raison particulière à votre venue ici... Seule?"

Si le début de la phrase laissa Bara indiférente-c'était une simple question à laquelle elle n'aurait pu échapper-, le mot qui terminait la phrase et que le rouquin avait du hésiter à dire lui fit légèrement froncer les sourcils. Seule? Et alors? Elle n'avait pas le droit de se promener seule, peut-être? Le sodat ne pensait sûrement pas à mal en disant cela, craignant peut-être pour sa sécurité, mais cela fit monter en Bara une bouffée de colère qu'elle eu du mal à masquer sur son pâle visage. N'avait-elle pas le droit de se promener seule sans qu'on soulève ce point comme s'il s'agissait là d'un véritable problème? N'avait-on pas marre d'ainsi s'inquièter à son sujet? Elle n'était pas une poupée de porcelaine fragile, elle savait se défendre! Seule, oui, seule! Elle n'avait pas besoin de quelqu'un en permanence à ses côtés, elle n'allait pas tomber malade d'un seul coup, elle savait se ménager, elle ne ferait rien de stupide. Peut-être était-ce de la fierté mal placée, ces gens voulaient simplement l'aider, mais elle en avait assez qu'on s'inquiète ainsi à son sujet. Elle savait se débrouiller seule, elle n'était pas fragile au point de s'écrouler à tout moment, elle savait se battre. Affichant un sourire crispé sur son joli visage, la jeune fille haussa à son tour sa voix, une once de colère présente dans cette dernière:

"Oh, vous...inspectiez? (Elle imita éxagérement le rouquin, un pas en avant, un pas en arrière, avant de s'immobiliser de nouveau.) Drôle de manière d'inspecter. Vous avez perdu quelque chose, peut-être? Quant à ma présence en ces lieux...Aucune raison particulière si ce n'est le besoin d'air frais. Et seule...Pourquoi êtes vous seul, vous?"

C'était stupide, la réponse était évidente à ses yeux. C'était simplement pour montrer d'une manière détournée que ce dernier mot ne lui avait pas plu. Elle ne voulait pas se disputer avec ce jeune homme, mais son énervement se ressentait dans ses paroles. Elle éspéra qu'il ne le prendrait pas trop mal. Il n'avait rien dit de grave, en vérité. C'était juste elle qui avait un problème, à s'énerver seule sur un seul mot.

[Tant qu'un monstre aux yeux injectés de sang ne se jette pas sur lui, il devrait survivre.x'D]

Claid s'attendait déjà plus ou moins à avoir droit à des commentaires pas forcément doux à entendre. Parce qu'il savait que la raison qu'il avait donné pour se justifier était impensable et proche du ridicule. L'espoir qu'il y avait placé était maigre mais existant. Mais soyons réaliste, il n'aurait pas pu sortir le plus naturellement du monde à Bara qu'il essayait de voir la différence entre la neige d'Hatès et celle de Moria, si toutefois il en existait une. Elle l'aurait pris pour un fou si ce n'était pas déjà fait.

"Oh, vous...inspectiez?" Demanda-t-elle, avec une certaine moquerie dans la voix.

À partir de là, elle fit un pas en arrière puis en avant, avant de de nouveau s'immobilisait, le tout en observant la neige sur laquelle elle marchait. Claid n'eut pas besoin de voir la fin de son petit spectacle pour deviner de quoi elle voulait parler. Il regarda ailleurs, la mine légèrement agacée. Okay, il était vrai que vu comme cela, ça paraissait totalement idiot. Quoique non, même en le sachant, ça paraissait tout aussi idiot. Comme si il suffisait de faire un pas dans un autre pays pour déclencher une avalanche d'émotion, surtout si près du sien, le changement n'était pas vraiment flagrant. Ennuyé, le jeune garçon reporta son attention sur Bara, qui visiblement, n'avait pas fini de se moquer de lui.

"Drôle de manière d'inspecter. Vous avez perdu quelque chose, peut-être? Quant à ma présence en ces lieux... Aucune raison particulière si ce n'est le besoin d'air frais. Et seule... Pourquoi êtes vous seul, vous?"

À ces paroles presque dédaigneuses et pleines d'audace, il eu un petit geste de recul sous l'effet de la surprise, suivit d'un léger froncement de sourcil. Après ça, il refusait de jouer les lèches-botte. Car après réflexion, ils étaient tout les deux seuls, encerclés seulement par des arbres, de l'eau et de la neige. Aussi, on pouvait dire que le sang-mêlé était à son avantage, même si il n'était aucunement question de lui faire du mal ou quoi que ce soit d'autre, et de toute façon, il s'en savait incapable. Son œil droit lui piqua très légèrement, et il s'en voulu aussitôt d'avoir eu ce genre de pensés haineuses. Il eut vite fait de remarquer qu'il n'aurait pas dû dire le dernier mot qui lui avait brûlé la langue, mais il du avouer qu'il ne s'attendait pas à ce qu'elle le prenne aussi mal. Il trouvait cette méchanceté gratuite sans fondement et profondément injuste à son égard. Rien n'avait obligé la jeune fille à lui adresser la parole et si elle avait voulu rester seule jusqu'au bout, elle aurait très bien pu tracer son chemin sans être obligé de venir à sa rencontre. Elle avait beau être classé plus haut que lui dans plusieurs catégories, le jeune soldat n'appréciait pas ce genre d'ironie car il restait un être vivant avec des sentiments propres. Sûrement que son interlocutrice ne savait pas que le reste de la population n'était pas ses domestiques, et n'étaient donc pas obligés d'affronter le caractère difficile de la demoiselle aux yeux améthystes. Aussi Claid fit une sorte de sourire faussement ravi.

"Oh... Je ne souhaitais en aucun cas vous froisser, j'en suis désolé." Mais il cessa finalement toute plaisanterie, prenant un air tout ce qu'il y a de plus sérieux. "Mais votre grand frère ne vous a jamais dit que 'prendre l'air' seule près d'une frontière ennemie était risqué? Personnellement, je trouve qu'une princesse est un excellent objet de rançon. Après ça, je n'insinues pas que vous ne pouvez pas vous défendre seule, bien heureusement."

D'ailleurs le danger n'était pas qu'à l'extérieur du pays, dommage pour eux... Et oui, c'était une sorte de reproche et il avait du mal à croire qu'il faisait la leçon à quelqu'un d'aussi haut placé. Il fit rouler une de ses mèche couleur feu entre ses doigts, le nez enfoncé dans le col que formée son écharpe. Qu'elle le prenne comme elle le voulait maintenant... Mais finalement après une mimique ennuyée, il regretta vite ses paroles. Sûrement que la jeune Noble lui avait donné quelques unes de ses ondes négatives. Une fois encore, il était mal parti pour se faire bien voir... Mais au point où il en était, ce n'était plus vraiment ce qui l'intéressait le plus. Se sachant déjà suffisamment bas, il ne pouvait que remonter dans l'estime, c'était le seul avantage quand on fait parti des derniers. Toutefois, répondre du tac au tac le tentait, même si cela lui attirerait de gros ennuis, être à proximité de la frontière d'Hatès-Moria n'arrangeant en rien sa situation. Il n'y avait que lui pour penser à ce genre de chose en présence d'une personne importante... Mais aussi bien, la prochaine fois, il répondrait simplement à sa question avec politesse, et s'en irait avant d'avoir droit à une mauvaise humeur apparente à laquelle il ignorait la cause. Et ça serait bien fait pour elle si tout le monde lui tournait le dos, elle se rendrait sûrement compte de ce qu'elle rate, vu que d'après lui, personne ne devait lui faire de remarque sur son comportement vu qu'elle était de sang royal. Il souffla du nez, bien décidé à mettre ses projets à exécution la prochaine fois. Et pourtant, étrangement, en détournant de nouveau son regard émeraude vers sa princesse, son idée précédente lui parut stupide et inenvisageable, ne voulant pas rentrer dans son petit jeu. Il soupira, un peu mal à l'aise, avant d'essayer de retrouver le sourire, ce qui ne fut pas chose aisé. Il était stupide qu'ils se disputent ici et maintenant dès la première minute où ils se parlaient. De plus, Claid n'était pas du genre à chercher querelle à tout le monde et il doutait que malgré tout, cela fasse parti des hobbies préférés de Bara. Aussi, il préférait passer l'éponge là-dessus, mettant ça sur le compte du c'est-pas-son-jour. Mais cela ne changeait en rien sa situation, faire preuve de compréhension ne le mènerait pas bien loin... Et puis, si il pouvait retrouver ce qu'il cherchait simplement en fouillant la neige comme on retrouve une pièce de monnaie, il serait le plus heureux des hommes.
Claid s'ébouriffa ses cheveux placés à l'arrière de sa tête, avec un sourire un peu gêné mais tout à fait inoffensif. Voir quelqu'un changer aussi brusquement de comportement pouvait être assez déroutant effectivement. Aussi, sa bouche se fendit en un sourire bienveillant. Il avait décider de paraître agréable, et si la personne en face de lui continuait sur la voie du mécontentement, hé bien il continuerait à sourire, et au final, ce serait elle et non lui qui trouverait ça agaçant.

"Oh, et... Je ne crois pas être aussi seul que vous le pensez."

Qu'il sache, il était bien en sa compagnie, à moins que la princesse du nord ne se considère elle-même comme 'rien'. Mais après tout, question stupide, réponse stupide.

"Oui, enlevée, bien évidemment. S'ils veulent la guerre, c'est le meilleur moyen. Moria, un pays aussi inutile et sans intérêt que cette pimbêche qui le dirige. Je ne pense pas qu'une guerre soit en leur faveur. Après, si des idiots inconscients veulent attirer les foudres d'Hatès sur leur Royaume, c'est leur problème."

Claid leva un sourcil à cette réponse, sans laisser passer la moindre émotion. Toutefois il laissa échapper un soupir tellement discret qu'il fut confondu avec une longue expiration sortant par le nez, et faisant apparaître un court moment, un nuage de vapeur. Apparemment, selon le noble Mavis, le royaume rival de celui des neiges était Oria, mais le blond avait aussi précisé qu'Hatès ne s'attendait avec aucun des trois royaumes, plutôt inquiétant, en sachant que que Oria et Moria sont sur une bonne ligne d'entente. Mais là, il en avait la confirmation par une personne qui était d'avantage mêlée à cette histoire. Selon la jeune fille en face de lui, c'était comme si tout était joué d'avance, étant assurée que le royaume de son frère était beaucoup plus fort que celui d'en face. Claid ne connaissait pas personnellement la dirigeante du pays de Moria, et il ignorait si Bara l'avait déjà rencontré pour qu'elle ait droit à tant de mépris de sa part. Mais en même temps, peu de personnes méritaient le respect de la princesse d'après elle. Et après tout, il avait dit ça comme ça, il n'avait pas prétendu que Bara Bellanca se ferait enlevée dès qu'il partirait, et que ses kidnappeurs fassent forcément parti du peuple du vent. Oui, le métisse avait juste imaginer le pire comme moyen de prévention. Parce que quelque part, c'était le travail qu'on lui avait attribué.

"Mais ce n'est pas comme si ma disparition vous chagrinerait, n'est-ce pas?"

Claid cru un moment qu'il avait mal-entendu la question. Elle se croyait haïe de tout le monde? Autant le rouquin n'aurait pas été surpris qu'elle ait la grosse tête, mais l'inverse... C'était sûrement une question à laquelle elle n'attendait pas de réponse, se l'imaginant très bien. Il observa un moment Bara qui le fixait de son regard violacé, ne cherchant pas à cacher le petit étonnement qui l'avait pris. Ça avait tellement d'importance pour elle de savoir si elle était appréciée? Surtout par lui, simple petit soldat croisait deux fois dans sa vie dont elle ne devait même pas se souvenir? Probablement que non, sûrement n'était-ce qu'une façade. Claid avait un côté sensible, et si c'était considéré comme un défaut, il se garderait bien de le montrer. Il haussa les épaules, voulant paraître insensible.

"Et vis-versa, la mienne ne vous ferez pas pleurer non plus. 'Un soldat de plus ou de moins...'" Il détourna aussitôt le regard en fronçant les sourcils tellement ce qu'il venait de dire le répugnait, comme si on lui avait obligé de le faire.

Profondément véridique. Elle lui parlait, mais au fond, elle se fichait pas mal de lui. Qu'il meurt demain ne l'accablerait sans doute pas de chagrin, si elle voulait causer avec un autre soldat, elle n'avait que l'embarras du choix. Pour Claid, c'était différent si on adoptait ce point de vue. Il était étrange de voir comme lui voulait attirer les foudres de la princesse Bara sur lui-même. Malgré ses dires qui se voulaient froid, de sorte à lui rendre la pareille, il tenait à elle d'une certaine manière. Toutefois, il trouvait ces idées avancées profondément agaçantes. Comment pouvait-elle savoir ce qu'il ressentirait sur le coup à l'avance? Peut-être qu'il en serait profondément chagriné ou bien qu'il s'en ficherait complètement. Personne ne pouvait le savoir, pas même Claid, même si il savait qu'il ne resterait pas totalement stoïque devant cette éventualité. Il eu un petit geste de recul avec la tête, mal à l'aise. Si Bara pensait savoir la réponse à sa question en la sachant cruelle, pour rien au monde le rouquin n'aurait échangé sa vie avec la jeune fille, aussi luxueuse soit-elle. Il devait être affreux de se réveiller tout les matins en pensant que les personnes qui peuplaient votre royaume et risquaient leur vie pour vous défendre ne tenaient pas un minimum à vous. Autant se jeter d'un ravin tout de suite. Et c'était sûrement dur des deux côtés, ne pas avoir de but pour se battre ne garantissait jamais une victoire totale.
Qu'importe si elle le détestait ou même pire, l'ignorait, lui s'était attaché d'une manière inexplicable. Il cherchait à lui cacher ses émotions et à réagir de la manière dont-elle pensait que les choses devaient se dérouler comme ça et pas autrement. Pourquoi? Parce qu'elle était sa princesse en titre, et que malgré tout les propos qui faisaient qu'il aurait plus que deux raisons de la détester, il ne changerait pas d'avis avant longtemps. Lui-même trouvait ce raisonnement profondément stupide et inutile, et pourtant... C'était sûrement ce que l'on appelait la fidélité. Tout comme le chien qui se faisait battre mais qui malgré tout restait aux côtés de son maître. Claid répugnait l'idée de se trouver dans la peau du brave toutou à ce moment même. Les différences éloignent les gens, non? C'est comme ça que ça marche. Normalement, le garçon au cache-œil devrait faire une ronde accompagné d'un autre soldat, et pas à rester au bord du lac du pendu, à se disputer gentiment avec la princesse de son royaume. À croire que le militaire n'était pas normal et idiot de ne pas faire parti de la généralité.

"Et je paris que vous préféreriez être seul. Je me trompe? Ce n'est pas une bonne chose que d'ignorer votre Princesse, cependant, ou de partir sans sa permission. Alors je pense que vous allez être obligé de rester ici le temps que je voudrais. A moins que... Vous ne vouliez me tenir tête?"

Ou comment dire 'reste ici'.
Toujours de la moquerie, autant dans la voix que sur le visage. C'est là que Claid se rendit compte à quel point la ressemblance entre Bara et Dahrenn était frappante. Nullement surpris cette fois-ci, il lui sourit de manière à ce qu'elle pense qu'il avait opté pour la mauvaise idée, prêt à dire un 'pourquoi pas' à tout moment. Pourtant, il ne vint jamais.
Et pour tout dire, Claid n'aimait pas la solitude, il était en plein dedans seulement parce qu'il n'avait pas le choix et que celle-ci le traquait sans relâche. Pour preuve, même si il s'agissait de Bara, il était tout à fait ravi de voir quelqu'un dans un lieu pareil à cette heure là. Alors disons que c'était un pari perdu, mais répondre oui à sa question relèverait du suicide.

"Oh, mais ce n'est pas comme si c'était une corvée!" S'exclama-t-il joyeux, comme si il on venait de lui demander de rendre un service contraignant qui ne lui posait pas le moindre problème. "Et n'allez surtout pas croire que je veux à tout prix contesté toutes vos idées...!"

Le jeune métisse avait décidé de prendre le problème autrement. Son but n'était pas d'énerver sa supérieure au maximum qu'elle pouvait l'être, ni de prouver qu'il possédait une bonne humeur à toute épreuve. Le caractère difficile des Bellanca persévérait à chaque mot qu'elle disait, et si il ne jetait pas d'huile sur le feu, disons qu'il soufflait dessus pour l'attiser. Mais quelque part, il trouvait cette situation plaisante à vivre, ça ne lui arrivait certes pas tout les jours...

"Enfin bon, vu que j'ai décidé de ne pas vous tenir tête et de rester sagement ici jusqu'à ce que vous changiez d'avis... Qu'est-ce que vous avez prévu maintenant?"

Il ponctua ses parole d'un de ses sourires de gamin. Et il était vrai qu'il ignorait et n'avait aucune idée d'où elle voulait en venir mais qu'importe, c'était toujours mieux que de marcher seul. Lui devait patrouiller jusqu'au soir et elle 'prendre l'air' sans contrainte d'heure. Mais rester ici était plus ou moins étrange en sachant qu'il n'y avait rien à part la neige, le lac, la neige, la forêt environnante, et... De nouveau la neige.

Bara avait entendu la remarque de Claid avant qu'elle ne prononce sa dernière phrase, mais n'y avait guère fait attention. Un soldat de plus ou de moins...Il était vrai qu'un soldat mort au combat ne posait aucun problème particulier au royaume, il y en avait encore tellement en vie, ce n'était pas la mort d'un seul qui allait changer quoi que ce soit. Un soldat tombé au combat ne changerait pas sa vie, ni celle de son frère, ni celle d'à priori toutes les personnes qu'elle connaissait au sein du château. C'était vrai, un soldat était remplaçable, tout comme même un Général des Armées ou un Stratège, même si c'était plus dur à remplacer dans ces deux derniers cas de figure. Les soldats, il y en avait toujours et encore, et s'il n'y en avait plus, aller les chercher de force n'était pas un problème. Son regard toujours dirigé vers le jeune homme aux cheveux roux, Bara se demandait s'il se considérait plus comme un 'soldat' ou comme 'lui-même'. Il était vrai, s'il se considérait plus comme un soldat, sa vie n'avait guère d'importance. Mais s'il se considérait comme lui-même, alors...Pour les personnes qui l'aimaient, ses amis, sa famille, s'il en avait toutefois toujours une, sa mort serait une grosse perte. Bara n'aurait pas pu dire que si ce dernier était mort sur le champ, elle l'aurait regretté, cela aurait été un mensonge éhonté, et il l'aurait su aussi bien qu'elle. Peut-être aurait-elle ressentit au mieux un peu de pitié pour ce jeune homme si jeune et mort si vite. C'était assez rageant de mourir alors que toute notre vie était encore devant nous. Ce n'était pas mieux non plus de vivre au jour le jour en pensant que toute votre vie était déjà derrière vous. Enfin...Elle n'allait pas s'étendre sur ce sujet, il n'était guère joyeux, et elle n'était pas là pour s'apitoyer sur son sort ou celui du rouquin. Trop de personnes avaient un sort semblable au leur, il fallait juste voir la réalité en face et taire ses souffrances et ses doutes, même si cela pouvait être très difficile parfois.

"Oh, mais ce n'est pas comme si c'était une corvée! Et n'allez surtout pas croire que je veux à tout prix contesté toutes vos idées...!"

Bara leva un sourcil, quelque peu surprise par le ton joyeux qu'avait employé le soldat aux yeux verts pour parler. Visiblement, rester ici en sa compagnie n'avait pas l'air de le déranger plus que ça. Oui, cela l'étonna, elle devait l'avouer, mais elle ne chercha pas la raison de ce sourire, elle n'était après tout pas très importante aux yeux de la jeune Métisse, qui se contenta de légèrement frotter son bras gauche de sa main droite. Voyant le soldat ouvrir la bouche pour ajouter autre chose à ses précédentes paroles, la jeune fille aux couettes retint ses remarques, laissant la voix du rouquin briser de nouveau le silence qui s'était installé sur la campagne enneigée:

"Enfin bon, vu que j'ai décidé de ne pas vous tenir tête et de rester sagement ici jusqu'à ce que vous changiez d'avis... Qu'est-ce que vous avez prévu maintenant?"

Bara Bellanca laissa retomber ses bras le long de son corps, pour ensuite changer d'avis et les croiser de nouveau sur sa poitrine, promenant son regard sur le paysage, avant de ne finalement le reposer sur le visage de Claid. Tiens donc, ainsi avait-il décidé de ne pas lui tenir tête et d'écouter sagement tout ce qu'elle dirait? La demoiselle Bellanca hocha doucement la tête avec un petit sourire, satisfaite apparemment des paroles du soldat au cache-œil. La jeune fille avait l'habitude qu'on lui obéisse depuis qu'elle était petite, que l'on se plit à ses moindres caprices et à ses quatre volontés. Elle avait depuis son plus jeune âge eu tout ce qu'elle désirait sans restriction, et c'était sans aucun doute de là que venait en partie ce comportement de peste qu'elle avait à l'égard de beaucoup de monde. Elle avait tendance à voir les personnes qu'elle ne connaissait pas comme ses serviteurs, et à avoir de ce fait parfois un comportement plus qu'insupportable. Fais-ci, fais-ça, apportes-moi ceci, apportes-moi cela...La fillette aux petites couettes et au visage boudeur n'avait pas réellement changé avec le temps, finalement. Bara se disait par moments qu'elle aurait pu être plus gentille avec telle ou telle personne, que ces personnes n'avaient pas mérités la manière dont-elle leur avait parlé. Mais même si elle regrettait ses actes, ce qui est fait est fait, et elle n'avait aucun moyen de revenir en arrière. Et à chaque fois, c'était la même chose: Elle voulait faire des efforts, mais le naturel revenant au galop, elle n'arrivait à n'en être que plus détestable.

La jeune fille pensait alors que ne pas ouvrir la bouche était la meilleure des solutions. Avec un visage d'ange et un sourire chaleureux plaqué sur son visage, on ne pouvait que l'admirer, n'est-ce pas? Ce n'était pas difficile de jouer la petite fille modèle, n'importe qui aurait pu jouer ce rôle rien qu'en endossant un joli sourire. Et de cette manière, les gens vous aimaient, même s'ils ne vous connaissaient pas. Bara poussa un petit soupir quasiment inaudible à ces pensées, fermant ses yeux d'améthyste l'espace d'un instant. Elle était certaine que la plupart des serviteurs du château ne l'aimait pas, que beaucoup de ces personnes au rang social bien inférieur au sien la haïssait pour ce qu'elle leur disait et leur faisait faire. Mais c'était bien comme ça, vraiment. Elle savait pertinemment que tout le monde ne pouvait pas l'aimer, et tant que ces personnes remplissaient leurs fonctions, c'était bien. Chacun à sa place, masquant ses sentiments derrière une barrière professionnelle, et tout irait bien dans le meilleur des monde.

"Je n'ai rien prévu de particuliers...Fit Bara en levant ses grands yeux vers le ciel gris qui s'étendait au dessus d'eux, Mais si vous le désirez, je peux très bien prévoir quelque chose sur l'instant."

Bara se pencha, se mettant soudainement à genoux dans la neige. A l'aide de ses mains gantées, elle assembla la neige molle en une boule de forme à peu près ronde, la pétrissant encore et encore de manière à ce qu'elle soit bien compact et tienne dans sa main. Elle se releva ensuite, avec un sourire satisfait, époussetant de sa main libre la poudreuse restée sur ses vêtements. Elle reporta ensuite son attention sur le rouquin, et lui adressa ces paroles:

"Je vais tester vos réflexes. De cette manière, je saurais si vous êtes un bon élément de notre armée-ou non. Et excusez moi...Mais j'ai oublié votre nom. Je l'oublierais sûrement de nouveau si vous me le redonnez, mais je m'en souviendrais au moins pour aujourd'hui. Et c'est aujourd'hui que j'en ai besoin, alors..."

Elle laissa la fin de sa phrase en suspend, jouant avec la boule de neige qu'elle avait entre ses mains. Elle lui enverrait dessus, eventuellement. Cela pouvait être drôle, de le voir essayer d'éviter ces missiles blancs. Mais son nom...Elle était assez déçue de ne pas avoir pu s'en souvenir. Il n'avait pas du la marquer tellement la première fois, mais...Tout de même, elle aurait préféré s'en rapeller, aussi inutile que cela puisse être.

Claid avait remarqué que lorsqu'il prenait la parole, son ton réjouit semblait étonné sa supérieure. À croire qu'elle n'avait jamais entendu ni vu quelqu'un rire et sourire. Ou sinon, elle avait bien trop l'habitude que l'on s'adresse à elle avec d'une manière intimidée mélangée à un respect profond ou parfois de crainte. Or, le rouquin était une personne qui souriait sans arrêt pour diverses raisons, même si la situation dans laquelle il se trouvait était critique. Parce qu'il pensait -ou plutôt croyait- que sourire était le meilleur moyen d'oublier ses problèmes, il n'avait pas trouver d'autres solutions pour oublier à quel point sa vie était misérable et triste. Petit à petit, c'était devenu une façon d'être qui venait naturellement, qu'il ne commandait plus autant qu'autrefois. Du fait que même si Bara n'aimait pas cela et lui demandait d'arrêter, pas sûr qu'il y arriverait du premier coup.
Durant un moment, Claid pensa que sans le vouloir, il avait monopolisé la conversation entre eux deux, du fait qu'il lui semblait que sa cadette restait mystérieusement silencieuse et un peu hésitante, comme si elle venait d'oublier ce qu'elle voulait dire un instant plus tôt, ou bien s'était ravisée. Son regard couleur d'améthyste se posait souvent sur le paysage enneigé environnant pour ensuite toujours revenir sur lui. La façon dont elle l'observait le mettait mal à l'aise d'un côté, il se sentait comme coupable d'être ici, et éventuellement d'être la tâche au milieu du tableau, l'imperfection dans son panorama. Et si ce n'était pas les réelles intention de sa princesse, c'est comme ça qu'il voyait les choses lui, ce qui était assez dérangeant... Quand bien même, il n'allait pas se décaler sur le côté, cela aurait été stupide, et la jeune fille n'aurait peut-être pas compris la raison de ce geste et serait même capable de mal le prendre... Elle ne savait pas où mettre ses mains, ou même bras. Ils ne restaient jamais immobiles, ils se balançaient, se frotter, se croiser... Claid ignorait si c'était parce qu'il faisait un peu froid, ou si c'était maladif. Lui avait ce problème avec ses pieds. Il eu l'idée d'observer le sol pour voir à quel point il avait battu la neige et laissait ses empreintes un peu partout autour de lui... Pourtant, les deux jeunes gens n'avaient rien de deux hyperactifs...
Les paroles qu'il avait lui-même prononcé avec légèreté semblèrent avoir plu à sa cadette qui se mit à lui sourire, satisfaite. Ça la rendait heureuse de savoir qu'il était à ses ordres? Sans doute devait-elle déjà le savoir et être juste rassurée qu'il ne se rebelle pas contre cela, vu qu'elle n'était pas forcément en position de force et sans témoin, quoique... Pas sûr que cela est une certaine importance aux yeux de la sœur du dirigeant. Qu'importait, le jeune homme resterait vigilant sur ce point. Après quoi, elle leva les yeux au ciel et fit mine de réfléchir.

"Je n'ai rien prévu de particuliers... Mais si vous le désirez, je peux très bien prévoir quelque chose sur l'instant." Déclara-t-elle simplement.

Le soldat à la chevelure rougeâtre eu une sorte de demi-sourire. Certes, il ne demandait pas à la benjamine Bellanca de trouver de quoi les occuper tout les deux. Si son objectif était juste d'être dehors en compagnie de quelqu'un mais dans le calme, elle pouvait très bien s'asseoir quelque part et Claid resterait gentiment à proximité comme elle l'avait demandé. Ce n'était pas un défi qu'avait lancé le garçon à l'unique iris verte, juste de quoi comblé le vide, au point où il en était, rester sans rien faire ne le gênerait pas le moins du monde. Mais si Bara ne l'entendait pas comme ça, il ne pourrait pas s'opposer par crainte qu'elle pense qu'il veule toujours la contre-dire. Aussi, il serait patient. Toutefois, son air serein disparu de son visage comme éclate un bulle de savon, cédant presque à la panique quand la princesse du royaume glacé tomba subitement à genoux dans la neige. Instinctivement, il tendit sa main dans le vide sans toutefois la toucher quand il s'aperçut qu'elle l'avait fait volontairement pour faire il ne savait quoi avec la neige qui était à leurs pieds. Claid posa sa main sur son cœur pour le calmer, libérant un soupir de soulagement, pour ensuite mettre rapidement les deux dans les poches de son pantalon, faisant remonté sa veste trop longue pour lui permettre ce genre de chose. Le rouquin n'imaginait même pas ce qu'il aurait dû faire si Bara avait soudainement eu une crise de fatigue ou un autre truc en rapport avec sa maladie soit-disante incurable. Pour sûr, il aurait été bien embêté, sans doute seraient-ils rentrer au château à la vitesse de l'éclair. Après de telles pensées, le jeune Firestone ne put s'empêcher d'élargir son sourire, comme ça, pour rien, en la regardant faire sans vraiment comprendre. Il profita de cet instant d'inattention de la part de la jeune fille pour jeter un regard circulaire à la campagne blanche. Elle lui avait fait elle-même comprendre que Moria n'était pas un pays très puissant militairement, qui ne cherchait pas d'embrouilles, mais en cas de problème, ce n'est pas lui qui changerait grand chose. Il n'était tout simplement pas rassuré de trainasser ici accompagné de quelqu'un de trop important à son goût, et même si il ne devait rien faire de particuliers, il pensait avoir une responsabilité bien trop lourde pour lui sur les épaules à ce moment même. Mais à quoi bon imaginer de pareils scénarios quand il y a peu de chance qu'ils se passent réellement. Oui, il n'y avait vraiment aucune raison de s'en faire.
Finalement, la jeune femme aux cheveux aux reflets couleur sapin se redressa pour de nouveau être à peu de chose près à la hauteur de Claid. C'est sans un réel étonnement qu'il observa qu'elle avait formé une boule de neige entre ses mains, et la tassait encore pour la rendre plus solide. Oui... Vraiment aucune raison de s'en faire. Le jeune homme au bandeau laissa échapper une petit rire nerveux devant la mine satisfaite de sa cadette. Il ne lui fallut pas plus d'une demie-seconde pour deviner qu'elle s'était donné ce mal pour faire le projectile qu'elle lui enverrait certainement dessus.

"Je vais tester vos réflexes. De cette manière, je saurais si vous êtes un bon élément de notre armée-ou non."

C'était lui, ou le 'ou non' avait été clairement souligné? La prochaine fois, il se tairait et se contenterait de suivre la jeune Bellanca en tant que soldat ennuyeux et sans laisser paraître un seul sentiment, comme il l'avait fait avec son général des armées, et encore, même là il avait fait une bourde... Et puis ce n'était pas le sujet! Ce n'était pas maintenant qu'il allait changer d'avis au risque de passer pour un dégonflé. C'était un test qu'elle voulait, pas assister à une feinte pour voir à quel point il pouvait être malin quand il le voulait. Du coup, il n'y avait que deux solutions pour lui: cette boule de neige, soit il l'éviterait, soit il se la prendrait en pleine poire et c'était sûr qu'après ça, ce ne serait pas la boule de neige qui ferait le plus mal... Bien sûr, il y avait encore la solution 'Bara a loupé son coup'... Mais oh? Elle en forme une autre...!
Claid sembla hésité un court moment, si il se ratait sur ce coup là, il travaillerait aux cuisines au risque d'empoisonner tout le monde... Finalement, il gonfla un peu plus sa poitrine et d'un geste de la tête, il sortit son menton de son écharpe qui devenait gênante. Il fallait juste qu'il croit un minimum en lui, Bara n'était pas reconnu dans le royaume pour être une championne au visé, il avait ses chances après tout. Il acquiesça donc d'un geste positif de la tête avant de la pencher très légèrement sur le côté.

"Mmh, pourquoi pas... C'est d'accord!" Sur ce, il tourna les talons et s'éloigna d'elle, d'environs cinq mètres.

"Et excusez moi...Mais j'ai oublié votre nom. Je l'oublierais sûrement de nouveau si vous me le redonnez, mais je m'en souviendrais au moins pour aujourd'hui. Et c'est aujourd'hui que j'en ai besoin, alors..."

Le concerné dirigea son regard émeraude vers son interlocutrice. Alors elle l'avait bel et bien oublié... C'était décevant d'un côté, mais Claid ne pouvait pas lui en vouloir vu sa position sociale, elle devait avoir plus important à faire. Son visage sans expression particulière laissa place à nouveau à une mine souriante mais toutefois plus adouci, plus naturel. Ça avait été maladroit, mais lui avait pris ça comme un désolé qu'elle n'avait pas voulu dire, sûrement parce que malgré tout, quelque part, la jolie demoiselle devait en être touchée dans son égo, surtout si elle n'avait pensé qu'à ça depuis leur rencontre d'aujourd'hui. Après tout, c'était lui le plus niais d'eux-deux.

"Firestone Claid." Dit-il simplement pour la soulager du sujet.

Au fond, il s'en fichait bien de son nom, elle aurait pu l'appeler 'toi' ou 'le soldat' durant toute la journée comme le faisait tout le monde, il n'aurait pas broncher, surtout en sachant qu'elle allait de nouveau l'oublier. Après tout, il avait l'habitude, ce n'est pas comme si à chaque fois qu'il passait quelque part, on hurlait son prénom. Il chassa vite ses pensées de son esprit pour se placer bien en face de la Noble et être attentif au moindre de ses gestes. Il voulait lui prouver qu'il avait des possibilités, même avec sa vue divisée par deux.

On lui en avait plusieurs fois fait la remarque, Claid possédait un regard particulier. Qui ça? Des gens qu'il avait croisé dans sa vie, des personnes qui l'avait ou non marqué, et à des degrés différents, mais toujours bien présentes dans sa mémoire sans faille, en espérant toujours être dans la leur. Bien sûr, le rouquin n'avait jamais était surpris de ce genre d'argument. Possédant un cache-œil depuis son enfance, il avait appris à supporter le regard des trop curieux, ne prenant plus du tout ça comme une agression. Okay, il pensait toujours que c'était plus ou moins malpolie selon le regard qu'on lui jetait. Il pardonnait aisément les jeunes enfants, se vexait aux regards des filles, et ignorait tout les autres. À chaque fois que le sujet revenait sur le tapis, le rouquin n'avait pas d'autres choix que de le prendre avec légèreté, ne pouvant en vouloir à personne sauf à lui-même. Il n'avait pas à être plaint, il était dans cette situation parce qu'il le voulait bien. Il n'imaginait pas une vie normale sans cache-œil, sûrement que cela déstabiliserait encore plus, avec cette fois lui comprit dans le lot. Néanmoins, lors de ces discutions, il jouait toujours les intrigués pour avoir plus de détail, même si les réponses se ressemblaient toutes à peu de choses près. Le bandeau qui lui barrait son œil droit ne semblait qu'attirer brièvement l'attention pour ensuite mieux se concentrer sur son visage entier. Il le comprenait parfaitement, sans doute même qu'on le différencier grâce à cela dans un groupe d'individu, l'armée même d'Hatès étant un parfait exemple. Le jeune homme aurait mis sa main à couper qu'on le désigner avec ses caractères plutôt original, ce qui était tout à fait normal après tout. 'Le rouquin qui est borgne'. Lui-même l'avait remarqué en se regardant dans un miroir, sa couleur de cheveux peu commune faisait d'avantage ressortir son iris bien trop verte pour passer inaperçu. Il était bien connu que l'on était jamais ce à quoi on voulait ressembler. Un brun aurait préféré être blond, quelqu'un aux yeux noisette les aurait souhaité bleu ciel... Niveau apparence, personne n'était jamais totalement satisfait de la sienne, et pour les personnes qui l'étaient entièrement, il y en avait alors à dire sur leur mentalité en général. Claid était d'un roux tantôt orange, tantôt rouge. Tantôt foncé, tantôt clair. Et ses yeux étaient de couleur totalement contraire. Comme quasiment tout le monde, il s'en plaignait, exagérant même souvent son cas, même si pire existait. Mais sans vouloir être égocentrique, le soldat trouvait cela fort injuste. Sûrement serait-il accepter totalement par un daltonien... Car à part la couleur, il se trouvait tout à fait normal. Toutefois, il lui semblait que la forme de ses yeux semblaient tirée vers le bas, comme si il était toujours fatigué. Ce caractère adoucissait un peu trop à son goût son regard, le faisant passer pour un apathique.
Le jeune homme fronça les sourcils, il était hors de question qu'il donne ce genre d'image. Peut-être qu'il prenait ce jeu trop au sérieux. On parlait d'une simple boule de neige après tout. Bara avait beau être la sœur de son souverain, elle en restait une Noble, Claid devrait donc normalement être plus doué qu'elle en ce qui est réflexe pour se maintenir en vie, c'était la logique même, cela devait tourner dans ce sens et pas autrement. Malgré un raisonnement fondé, il préférait rester prudent. Il suffisait d'un seul moment d'inattention pour faire une faute et connaître le caractère bien trempé des Bellanca, et lui avait déjà utilisé son joker dès son arrivée au château. Le jeune garçon au cache-œil avait beau être d'humeur taquine, il était dans l'obligation de faire un effort dans son attitude en présence de sa princesse, surtout si il ne voulait pas finir à moisir dans un donjon en pensant par la case 'salle de torture'. Hatès était loin d'être le royaume le plus parfait de par la personne qui le dirige, faire passer sa vie avant l'amusement était donc hautement recommandé.
Après un court égarement de conscience, Claid cligna des yeux pour se remettre dans l'ambiance. Dirigeant à nouveau son regard vert sur sa cadette, un simple échange leur fit comprendre à tout les deux que c'était bon. Légèrement en avant, ses muscles bandaient et ses bras un peu écartés, le soldat ne lâchait plus la boule de neige des yeux, tout à fait prêt pour réagir et ainsi éviter le projectile. Au moment où celui-ci décolla avec une certaine vitesse de la main gantée de la jeune fille, l'automatisme qu'eut le métisse fut bien sûr de prévoir où continuerait la projection et donc de se décaler dans le sens inverse à celle-ci. C'est avec étonnement qu'il fit crisser inutilement la neige sous ses bottes cloutées, tellement que la boule blanche finit sa course totalement à côté de lui. Il n'aurait pas bouger d'un pouce, le résultat aurait été le même, la boule de neige l'aurait effleuré de peu sans toutefois le toucher. Se sachant donc hors de danger, il continua de suivre du regard le projectile blanc qui s'éclata au contact du sol trempé. Une fois fait, son iris verte refit face à sa supérieure, un sourire mi-fier, mi-désolé peint sur le visage. On pouvait aisément dire qu'elle avait loupé son coup. Pour sûr, si elle testait les réflexes de Claid, lui entrainait son adresse. En voyant la cadette Bellanca s'énervait seule devant tant de maladresse de sa part, le rouquin comprit que le moment aurait été plus que mal choisi pour sortir la moindre remarque, méchante ou non, c'est donc avec un effort surhumain qu'il réussit à garder le silence. Bara se baissa à nouveau pour recommencer la manœuvre et tenter une seconde fois sa chance. Le joli visage à la fois agacé et honteux de la jeune sang-bleu fit accentuer le sourire de Claid qui se trouva dans l'obligation de faire semblant d'avoir froid et de le cacher dans le col que formé son écharpe. Il ne se moquait pas d'elle de manière méchante, cette situation ne le faisait pas rire, mais seulement sourire tellement la scène était mignonne et à la fois originale. Cette simple faute lui permit de prendre d'avantage confiance en soit pour le prochain lancé. L'erreur aurait été de la prendre de haut après ça, mais le jeune homme ne semblait pas être à ce point puéril pour le faire. Il ignora donc cette gaucherie aussi vite qu'elle s'était faite une place dans leur activité du moment, et se remit donc en position sans demander son reste, le regard un peu dur et concentré sur la nouvelle boule de neige qui prenait forme dans les mains de son interlocutrice.
Tandis qu'il attendait patiemment, Bara releva soudainement la tête dans sa direction, portant sa paume sur son front. Inconsciemment, Claid chercha à ne pas le rencontrer son regard et jeta un bref coup d'œil derrière son épaule, ne comprenant pas ce geste. C'était lui qu'elle regardait? Ça ne se pouvait pas, surtout de cette manière... On aurait dit qu'il apparaissait comme une toute nouvelle personne à ses yeux, un étranger sorti de nul part. C'était étrange, mais c'était ce qu'il ressentait. Un peu mal à l'aise, il fit semblant de n'avoir rien remarqué et laissa dériver sa vision vers la lisière d'une forêt de sapin. Seulement voilà, quand la seule personne à des centaines de mètre à la ronde placée juste en face de vous se met à rire d'un rire bien sonore... Sincère, il n'en savait rien, mais ignorer ça devenait difficile, relevait même de l'impossible, ou de l'insolence à l'égard de la sœur du roi. Partir dans son éclat de rire sans en connaître la cause aurait été stupide, surtout en se doutant vaguement que ça le concerné. Il leva un sourcil en la voyant toujours aussi rieuse, ne sachant quoi répondre. La situation devenait inquiétante là... Cette fille voulait vraiment le faire stresser à en lâcher du cœur...

« Claid Firestone... Je m'en rappelle, maintenant. N'étiez vous pas cet homme venu réclamer un poste il y a quelques temps au château? Je ne vous avais pas reconnu, vous... Avez prit quelques rides, depuis le temps. »

Claid releva soudainement la tête, intrigué, avant de la faire pencher sur le côté, un peu agacé. Alors voilà, son nom était presque le synonyme de l'idiot du village chez la famille royale. Pour sûr, ce jour-là, il aurait dû avoir la science infuse et se doutait qu'il serait accueillie par le roi et sa petite sœur en personne... Oui, quel idiot il était, lui qui pensait que les propriétaires seraient trop occupés pour ne serait-ce que s'apercevoir de son existence, voilà qu'il les avait rencontré en premier en mettant les pieds dans ce royaume et qu'il jouait maintenant dans la neige avec la cadette de leur famille dissoute... Le jeune homme fit la moue un court moment, toujours caché derrière son épaisse écharpe. L'idée de faire l'innocent et de dire simplement qu'elle s'était trompée de personne li avait bien sûr traverser l'esprit... Mais si elle ne s'était pas rendu compte de son identité de suite, elle semblait maintenant persuader de qui il était et la contredire maintenant aurait été de l'acharnement pour des choses vaines. Claid n'avait pas l'habitude de se vexer pour rien ou de s'en tirer à l'aide de mensonge, et pourtant... Le fait que la jeune fille se rappelle de la scène comme si il était arrivé hier l'énervait au plus haut point sans raison apparente. Disons que si ils se revoyaient un jour -et si elle se souvenait de lui- il aurait cette étiquette collé sur le front... Il ne répondit pas, acquiesça juste d'un mouvement de tête pour éviter de faire apparaître un faux sourire. Ce n'était qu'un mauvais moment à passer, et Bara lui avait fait comprendre par sa remarque et son rire qu'elle possédait un minimum d'humour, il devait juste en faire autant.
La princesse des neiges lança finalement sa seconde boule de neige plus déterminée et plus précisément que sa précédente tentative. Cette fois, Claid n'eut d'autres choix que de réagir si il ne souhaitait pas se la prendre plein fer. Autant on sentait les flèches sifflaient sans se rendre compte qu'elles vous avaient déjà traverser, mais dans le cas d'une boule de neige, c'était trop facile. Les journées du rouquin était presque entièrement dédiées au combat et l'esquive était déjà l'un de ses point fort avant qu'il entre dans l'armée. Aussi, alors que le projectile blanc était déjà à la moitié de sa course, le jeune sang-mêlé s'empara de son Maillet, le fit grandir sans pour autant qu'il n'atteigne des dimensions exorbitantes et tapa la boule de neige comme si il avait s'agit d'une simple balle. Cette dernière éclata bien sûr au contact de l'arme, mais les débris prirent une nouvelle vitesse et la direction du ciel. Claid la suivit du regard avant de reporter à nouveau son attention sur sa cadette, posant son Maillet sur son épaule. C'était une technique de bourrin, inutile de le nier...

"Ce n'est pas encore tout à fait ça...!" S'exclama le soldat avec une voix plus ou moins enjouée pour prouver que cette situation était loin de l'ennuyer.

Une fois fait, il s'approcha d'un pas en avant vers Bara, sans pour autant que la distance entre eux soit trop restreinte. Le but était bien sûr qu'elle le touche avant qu'il arrive à sa hauteur, et devenant donc de plus en plus compliqué pour Claid et le contraire pour la fille aux yeux améthystes. Comme ça, elle finirait certainement par le toucher, il n'y avait aucun doute là-dessus. Claid était loin d'être un défaitiste, mais il se doutait qu'il partait déjà perdant. Okay, le but n'avait pas été de jouer à une sorte de baseball, mais l'éviter simplement n'était pas assez original au goût de la récente recrue. Sans doute aurait-il été plus amusant de bouger plus, que lui aussi ait le droit d'attaquer, mais avec Bara, autant avoir beaucoup d'espoir et de lui demander franchement d'aller à une fête foraine avec lui. Ce jeu, il le mettait de côté pour les moments à venir avec quelqu'un avec qui sa liberté de mouvement et de parole était beaucoup moins limitée.

Des souvenirs de ses parents, Bara n'en avait que très peu, et s'appliquait du mieux qu'elle le pouvait à les garder profondément ancrés dans sa mémoire. Son père avait été de son vivant quelqu'un d'extrêmement important pour le pays qu'il dirigeait, et même après sa mort, il continuait de briller fièrement dans le cœur des habitants de la froide contrée du Nord de Lysandre. La pauvre petite fille qu'elle était à cette époque, du haut de ses dix ou onze ans, n'avait pas compris qu'elle ne reverrait jamais son père. Mort fièrement, l'épée à la main, sur le champ de bataille? Ça ne voulait strictement rien dire pour la petite fille aux cheveux verts foncés. Mais Bara pensait que pour n'importe quel enfant à qui on annonçait la mort d'un de ses parents, ces phrases ne voulaient rien dire. Elles ne remplaçaient pas le manque laissé dans la vie de l'enfant par la disparition de l'être aimé, pas plus qu'elles ne le faisaient revenir à la vie. Bien entendu, elles avaient augmenté la réputation de leur famille, mais c'était bien tout. A elle, elles ne lui avaient rien fait, avaient juste résonnées dans le vide sans aucun sens. Mort? Ça signifiait qu'elle ne pourrait plus jamais le revoir? Il n'avait jamais été très présent pour elle, sa condition de dirigeant obligeant, mais au moins, il avait fait l'effort d'être là à chacun de ses anniversaires. Sa mère, elle avait toujours été plus proche d'elle que son père, et sa perte avait été un véritable coup dur pour elle. Perdre ses deux parents en un laps de temps si réduit était choquant pour une enfant. Et comme si le destin ne semblait pas s'être assez acharné sur elle et sa famille, ou ce qu'il en restait du moins, sa maladie avait été déclarée quelques mois plus tard à peine. Pouvait-on faire plus cruel, elle se demandait? Si son frère n'avait pas été là pour la soutenir, elle ne savait pas si elle s'en serait remise, sincèrement. Oh, si quelqu'un avait entendu ses pensées, Bara ne doutait pas un seul instant qu'il aurait grimacé en rétorquant qu'elle se plaignait trop, et qu'elle n'était pas la seule malheureuse au monde, que comparé à d'autres, elle avait même plutôt une belle vie. Ce n'était pas faux. Mais ces ignorants parlaient sans savoir. Pouvait-on prétendre comprendre la douleur si nous ne l'avions jamais ressentie? Il pouvait y avoir des gens plus malheureux qu'elle, malades et sans famille dans la rue, mais elle ne les connaissait pas. Pourquoi aurait-elle prit la peine de s'en soucier? Elle avait bien assez à faire avec ses propres problèmes pour aller plaindre des étrangers dont-elle n'avait jamais entendu la voix. Elle était triste pour ceux qu'elle appréciait, elle avait pitié de ceux qu'elle connaissait. Et ceux qu'elle ne connaissait pas, elle s'en fichait. Monstre? Pas le moins du monde, voyons. Tout le monde agissait de cette façon, mais personne n'osait l'avouer. Au final, les honnêtes gens étaient critiqués, alors qu'on faisait les louanges des menteurs, qui se cachaient derrière un mur d'hypocrisie. Ceci n'était qu'un exemple de plus du ridicule du monde et les personnes qui le composaient. Elle avait été très triste dans sa vie. Elle avait beaucoup pleuré. N'avait-elle pas le droit de se plaindre? Sous prétexte qu'elle n'était pas la seule dans son cas, elle devait garder le silence et souffrir seule? Sûrement pas. Elle avait besoin de soutient. Comme n'importe qui en ce monde. Rien n'irait mieux si l'on se taisait en nous refermant sur nous-même.

Par exemple, le type roux en face d'elle. Elle était sûre qu'il avait été loin d'être heureux toute sa vie, elle aurait même parié qu'il avait été plutôt triste. L'était-il encore? Elle n'en savait rien, et même si elle aurait pu, en qualité de Princesse, lui demander de lui raconter sa vie, elle ne le fit pas. Pourquoi? Ce n'était pas tant une question de respect que d'égo. Elle venait d'affirmer, et elle le pensait toujours, que Claid n'avait pas eu une vie facile, et qu'il avait du être confronté à bien des obstacles depuis sa plus tendre enfance. Si en effet elle avait raison, lui demander de lui raconter tout cela aurait simplement été cruel, et aurait fait du mal au jeune soldat. Bara le savait, et pour cette raison, elle ne le ferait jamais, se mettant automatiquement à la place de son interlocuteur dans une telle situation. Mais si au contraire, son hypothèse s'était avérée fausse, et qu'il lui avait fait comprendre si elle l'avait questionné, elle se serait sentie plu honteuse que jamais. La jeune fille aux yeux d'améthystes était une personne qui détestait avoir tort, et qui détestait encore plus qu'on lui fasse remarquer qu'elle s'était trompée. Ce qu'elle pensait de Claid était faux, peut-être, mais cela lui convenait tout à fait; Elle n'en saurait jamais rien, elle pouvait bien penser ce qu'elle voulait. Quand Bara avait lancé la deuxième boule de neige, cette fois-ci dans la bonne direction, elle n'avait pu empêcher un petit sourire satisfait d'étirer ses fines lèvres. Bien, au moins, s'il y avait une chose dont-elle était certaine, c'était que cette boule de neige allait percuter sans faute le soldat s'il ne faisait pas un pas ou deux sur le côté. L'esquiver, c'était bien ce qu'il était censé faire, n'est-ce pas? La jeune métisse pensait avoir vu toutes sortes d'esquives dans sa vie, celui qui, maladroitement, s'écarte tant bien que mal de la route des projectiles, celui qui les évitent à force de pirouettes et cabrioles, celui qui qui se cache derrière un quelconque élément du décor en attendant que l'attaque passe...Mais ça, elle ne l'avait encore jamais vu, elle devait l'avouer.

Une fois la boule de poudreuse arrivée à sa hauteur, le rouquin avait fait grandir son maillet, et avait frappé la malheureuse boule, dont le restes avaient pris la direction du ciel de Printemps, suivis par le curieux et perplexe regard de la Princesse aux couettes. Ah, en effet, il pouvait aussi fonctionner ainsi. Elle n'avait pas rêvé, n'est-ce pas? Son maillet s'était agrandi. Pas de manière démesurée, mais assez pour qu'elle le voit sans avoir cru halluciner pour autant. Elle n'aurait pas du en être aussi surprise, il était un Métisse, et devait probablement avoir du sang de démon qui coulait dans ses veines. Les Démons étaient les seuls êtres capables d'user de la magie à haute dose, et si les Métisses étaient handicapés à ce niveau, avec de l'entraînement, ils pouvaient également l'utiliser. Son frère en usait parfois, mais rarement. Elle, elle n'y avait jamais eu droit. Trop d'efforts, lui avait dit le médecin qui s'était occupé d'elle par le passé.

"Ce n'est pas encore tout à fait ça...!"

Bara reposa son regard violet sur Claid en entendant ces paroles, qui s'était d'ailleurs légèrement avancé, son air surpris ayant laissé place à une mine satisfaite de nouveau. Il aurait pu faire quelque chose de plus beau et délicat, mais elle ne pouvait nier que cette méthode n'était pas efficace, pour quelqu'un qui fonçait dans le tas sans prendre la peine de réfléchir. Sans aucun doute était-ce d'une grande utilité sur un champ de bataille, quand tuer le plus d'hommes d'un seul coup était l'unique objectif des gens comme lui. Il avait agrandit son maillet, et elle était intimement persuadée qu'il pouvait prendre des proportions gargantuesques si son possesseur le désirait. Dommage qu'elle ne possédait pas le pouvoir de faire des boules de neige de trois mètres de haut, elle aurait pu tester les limites de son arme.

« C'était plutôt bien. Vous avez littéralement démolie cette pauvre boule de neige. Imaginez ce que cela aurait-été si je vous avait envoyé dessus un lapin vivant? »

Elle laissa s'échapper un petit rire. Aurait-elle pu lui lancer un animal dessus? Rien que pour voir s'il l'aurait frappé par réflexe, oui, elle en aurait parfaitement été capable. Mais n'ayant aucun oiseau ni lapin sous la main, elle avait peur de ne pas pouvoir se prêter à l'expérience. Comme c'était agaçant, rien n'arrivait jamais à point nommé. Se baissant de nouveau dans la neige, amassant entre ses mains la blanche et froide poudreuse, elle fabriqua un nouveau missile. Puis se penchant encore, un nouveau. Elle avait à présent deux boules de neige dans chacune de ses mains.

« Bien, bien...Essayons à deux, maintenant? »

Suite à ces mots, elle envoya rapidement sur Claid les deux boules de neige. Elle ne les avaient pas jetées de la même manière, et bien que visant toutes deux le soldat au cache-œil, une visait sa tête, alors que l'autre visait ses jambes. Allait-il dévier les deux, ou bien une seule seulement? Elle espérait qu'il penserait à de petits lapereaux en voyant les boules de neige arriver sur lui. Ça n'en serait que plus drôle.

Ce que Claid avait appris au cours de toute sa courte vie, c'est que l'on était incroyablement seul. Sûrement que son cas était l'un des pire, mais il était vrai que l'on vivait dans un monde où c'était chacun pour sois. Normalement, on avait besoin de minimum deux personnes pour commencer à vivre. Celles qui nous engendraient, puis qui nous élevaient, plus communément connues sous le nom de 'parents'. Or, Claid ignorait tout des siens et avait donc apprit à vivre sans. Il était clair que lorsqu'il était jeune, il ne comprenait pas pourquoi les enfants qu'il rencontrait possédaient ces proches, qui présentaient des similitudes physiques et parfois morale assez troublantes avec leur progéniture. Ne possédant aucun lien de sang avec qui que ce soit, le rouquin en était venu à se consoler avec des stupidités comme "au moins, moi je suis unique". Personne ne lui ressemblait et cela n'était pas plus mal au final, car il avait souvent entendu dire qu'il était agaçant d'être sans cesse confondu avec quelqu'un d'autre seulement par pure maladresse. Mais il fallait vraiment l'être pour confondre Claid, avec un cache-œil et ses cheveux flamboyants en pétard, on en croisait pas tout les jours des personnes comme lui. Comme tout orphelin à la naissance, il avait lui aussi tenté d'imaginer à quoi ses parent pouvaient-ils bien ressembler. De qui tenait-il son œil vert? Avait-il les mêmes traits du visage que sa mère ou les mêmes mains que son père? Sans doute ne le saurait-il jamais. Toutefois, se mettre à leur recherche n'avait jamais était une idée qui lui avait empêcher de dormir. À quoi cela lui servirait? Beaucoup de peine pour rien. Il avait vécu avec la certitude qu'on l'avait rejeté dès sa venue au monde, inutile de revenir vers les gens qui ne voulez pas vous revoir. S'y acharner reviendrait à du masochisme, et malgré les apparences, Claid ne l'était pas pour un sou. Et puis, ce n'est pas comme si il avait vécu dans la solitude toute sa vie non plus. Certes, il n'avait pratiquement plus personne sur qui compter en cas de problème, mais ce n'était pas si important si justement, il arrivait à éviter les problèmes en question. Claid avait la particularité de vite sympathiser et s'attacher aux gens, mais possédait aussi l'incroyable don de s'en défaire avec une facilité déconcertante. Il avait bien sûr des regrets après, mais c'est parce qu'il n'avait pas le choix. Il a beau ignoré pourquoi il était ici à ce moment précis, mais ce n'était certainement pas pour tenir compagnie aux personnes dans le besoin, sinon cela reviendrait à dire qu'il était lui-même dans ce cas de figure. D'ailleurs, quand on approfondissait les particularités de sa profession, cette dernière n'exigeait pas plutôt d'effacer les personnes qui étaient nuisibles à son royaume de par leurs agissements ou par leur faiblesse? Son rôle de soldat n'était pas celui des contes où il défendait des vies en sacrifiant la sienne. Non, il ne méritait pas autant d'admiration, loin de là. Être soldat avait une certaine classe de par l'image héroïque que l'on en avait fait, mais c'était un métier sale dont on se passerait volontiers pour dire vrai. Le champ lexical de l'armée était étroitement lié à celui de complication. Dans une armée, on avait beau être unis contre un même ennemi, aucun lien autre qu'un vague sentiment de solidarité, sans compter le patriotisme, unissait les combattants entre eux. On ne pouvait pas appelé ça une pseudo-famille comme l'aurait sympathiquement fait une petite entreprise. Claid savait ce que signifiait être entouré mais rester incroyablement seul malgré tout, être dans les rangs en était le parfait exemple. Au fond, sa vie était triste, très triste. Le jeune homme releva son regard vert sur sa princesse, avec un petit sourire en coin. Mais il y avait toujours pire...
Même si la personne en face de lui devait être loin d'être ravie de par sa présence, on pouvait dire que Claid servait à quelque chose qui n'avait rien de reprochable. "Occuper la princesse durant son temps libre", tu parles d'un job! Le rouquin en aurait eu une crise de rire si il avait lu ces mots sur un post-it appartement à un domestique. À l'exception qu'ici, c'est en quelque sorte lui qui jouait ce rôle, en guise de cible vivante en plus de ça. Il ignorait si Bara s'amusait bien, à lui lancer des boules de neige comme ça. Sans doute était-ce un peu puéril à leur âge et que cela aurait vite fait le tour du château si qui que ce soit les voyaient. La princesse et un soldat en train de se faire une bataille dans la neige... On voyait d'ici le tableau et les rumeurs qui en circuleraient... Dahrenn prendrait-il bien de savoir que sa jolie et fragile petite sœur gambadait seule dans la nature et à jouer avec le petit peuple? Qu'importe les raisons, sans doute ne courait-elle aucun risque à l'exception de sa santé en verre. Quand à Claid, au point où il en était, hein... Si il ne s'était pas moquer d'elle et de sa façon de les occuper, c'est parce qu'il en avait pas une seule fois eu l'idée de par sa mentalité relativement ouverte à tout et n'importe quoi. La jeune fille aux yeux étrangement violacés avait sûrement dû avoir le même raisonnement à son propos en le voyant battre la neige avec ses pieds pour observer une différence existante ou non entre Hatès et Moria.

« C'était plutôt bien. Vous avez littéralement démolie cette pauvre boule de neige. Imaginez ce que cela aurait-été si je vous avait envoyé dessus un lapin vivant? »

Le jeune garçon à la chevelure de feu se fit craquer une cervicale d'un mouvement de tête. Il posa son maillet sur son épaule tendit que son visage un peu crispé se détendit pour sourire le plus naturellement du monde à Bara. Nullement surprit, il prit sa prise de parole légèrement, ironie ou pas, il ne chercherait plus à savoir si elle avait ou non de la sympathie pour lui, car de toute façon, c'était impossible. Et... Un lapin vivant? Pourquoi lapin en particuliers? Qu'importe l'espèce, on ne jette pas des animaux sur les gens, qu'ils soient morts ou encore en vie. Hatès n'avait pas un régime parfait, mais ce n'était pas non plus Sal'ahë, le mieux était encore de garder le peu d'humain qu'il y avait en nous.

"Hé bien, j'imagine que j'en aurai pris beaucoup plus soin, surtout après vous avoir donner tant de mal pour pouvoir l'attraper et me l'envoyer ensuite dessus." Répondit-il instantanément en levant un sourcil, trouvant l'idée un peu stupide mais restant un minimum humoristique. "Mais vous seriez incapable de faire ça, n'est-ce pas?"

Mais parce que c'est trop mignon un lapin! L'idée que Claid se faisait des filles était clichée au plus haut point. Elles fondraient devant ce rongeur et renonceraient à l'idée de le maltraiter pour des choses aussi... Stupides? Égoïstes? Cruelles? Il ne pouvait pas imaginer une seule seconde que la Noble puisse faire cela, il n'arrivait pas à l'imaginer. Pourquoi? C'était prétentieux de se faire des idées sur les agissements de la jeune fille. Peut-être était-elle imprévisible ou que sa maladie faisait qu'il lui manquait une case, Claid n'en savait fichtrement rien, il la connaissait à peine, et pourtant, il maintenait ferme son avis à propos de cette histoire de lapin volant... Après, il ne contredisait aucunement le fait que la benjamine Bellanca ne soit pas douée pour jeter un quelconque objet à la figure du premier qui lui aurait déplu.

« Bien, bien...Essayons à deux, maintenant? »

"Hein?"

Question à laquelle il n'aurait même pas à se donner la peine vu que Bara avait déjà les deux projectiles en question et qu'elle s'apprêtait à les lancer à nouveau sur Claid. Pris au dépourvu, on pouvait le dire, mais c'était quelque part l'intérêt, un ennemi ne préviendrait pas qu'il vous prendrait pour cible après tout. De plus, la situation était différente de la précédente vu qu'il y avait maintenant deux missiles à éviter, un visant sa tête, l'autre ses jambes. Ainsi, dans un second automatisme, le poids de l'arme du jeune soldat toucha terre, formant un creux dans la neige tandis que son propriétaire pinça son manche à l'aide de deux de ses crampons disposaient sous sa botte. La barre trembla une seconde avant de s'étirer vers le ciel, élevant de cinq mètres au minimum Claid fermement accrocha à celle-ci. Oops... C'était même un peu trop haut là, il n'était pas le meilleur en contrôle de magie, il l'avouait, mais la soudaine panique avait fait qu'il était aller beaucoup plus loin que prévu. Bien sûr, les boules de neiges ne touchèrent pas leur cible devenu trop fine à cette hauteur qui est celle d'un homme, là où se trouvait une seconde plus tôt Firestone. Le rouquin au cache-œil tourna la tête pour les voir elles aussi finir leur course dans le sol enneigé. Les lapins revinrent à son esprit, mais il les repoussa en secouant sa tête dans un sens, puis dans l'autre. Enfin, poussant un bref soupir de soulagement, son manche auquel il se tenait maintenant d'une main se mit à baisser, et il n'eut qu'un petit saut à faire pour regagner la terre ferme. C'était moins une cette fois ci! Mais il ne continuerait pas à avoir de la chance comme ça indéfiniment et redouter fortement pour la suite. Son arme retrouva la taille d'un crayon qu'il rangea dans un petit harnais attaché à sa jambe droite, avant de mettre ses mains dans les poches de son pantalon. Il souffla un peu de vapeur, crispa ses épaules dans l'optique de réchauffer son visage dans son écharpe en se tournant vers Bara. Maintenant à deux ou trois mètres à peine d'elle, il se pencha légèrement en avant avec cette fois-ci un sourire taquin.

"Et maintenant?"

Malgré son rang de Princesse et tout ce qu'on pouvait bien raconter sur elle dans le château et la capitale, Bara Bellanca n'était encore qu'une enfant, qui avait parfois besoin de s'amuser et perdre son sérieux. A quinze ans, on a beau être adolescent, cela ne nous empêche pas de vouloir nous amuser de temps en temps, courir et rire n'était pas une activité prohibée arrivé à un certain âge, n'est-ce pas? Le contact de la neige sur ses mains nues, cela faisait des années et des années qu'elle ne l'avait plus senti, les gants ayant automatiquement été de rigueur après le diagnostique de sa maladie. Même si Bara ne l'aurait jamais avoué à voix haute, et encore moins en face du principal concerné-elle avait son honneur et sa fierté, et Dieu savait que son égo était grand et facile à heurter quand on savait s'y prendre-, elle enviait énormément Claid Firestone. C'était stupide et idiot, elle en convenait, elle ne le connaissait pas, ne savait rien de sa vie, de ses douleurs, de ce qu'il avait du traverser avant de se retrouver entre les gris murs du château de la septentrionale Hatès. Peut-être avait-il vécu des choses qui même en cauchemar ne lui viendraient pas à l'esprit, peut-être avait-il perdu toutes attaches et toute famille au cours d'accidents qui avaient pavés sa vie destinée à ne pas être des plus brillantes dès le début. Pour qu'il soit arrivé ainsi, nonchalant et souriant, demandant du travail et un endroit où se loger, il ne devait de toute manière pas avoir une vie privée très enviable. Bara le savait bien, et n'en faisait pas abstraction, loin de là. A chaque fois que son regard s'attardait sur l'unique œil émeraude du soldat auquel elle lançait des boules de neige en guise de projectiles, tous les hypothétiques malheurs qu'il pouvait avoir vécu lui revenaient en mémoire, et elle ne pouvait s'empêcher d'en frissonner. Et quand bien même il aurait pu être la plus malheureuse et malchanceuse des personnes en ce monde, elle l'aurait tout de même envié. Envier une telle personne, quelle drôle d'idée, lui aurait-on à coup sûr dit, accompagné d'un de ces agaçant sourires amusés, ceux qui nous donnent envie de frapper la personne qui l'arbore. C'était vrai, c'était une drôle d'idée. Mais ayant été élevée dans un cadre plutôt stricte et où la liberté lui avait parfois cruellement manquée, la jeune Princesse aux sombres cheveux avait maintes fois aspiré à une vie tranquille et dans laquelle elle aurait pu courir dans les champs de neige sans qu'on y trouve rien à redire. Sans que ses parents ne la dispute pour ne pas avoir été correcte, sans que son frère ne s'inquiète de sa trop fragile santé que la neige risquait de faire décliner à chaque seconde passée en son sein. Bara ne savait que trop bien que toutes ces réprimandes lui avaient été faites et lui étaient faites pour son bien, que sa famille n'avait jamais désiré autre chose que son bonheur, et pourtant...Un oiseau peut-être nourri et logé dans une cage en or, être empli de gratitude envers ceux qui lui avaient offert une si belle vie, ça ne l'empêcherait pas pour autant de rêver du ciel qu'il voyait à travers les barreaux de sa cage, si près et malheureusement inaccessible. Même s'il n'avait jamais goûté au plaisir de voler dans un éther bleu et lumineux, caressé par les douces brises qu'apportent avec lui l'été, il en rêverait chaque jour que Dieu faisait. Regrets. Tristesse. Impatience. Chaque beau mot avait son antonyme, chaque médaille avait son revers. Bara ne savait pas ce que cela faisait que d'être pauvre, et au risque de paraître trop franche et cruelle, elle se fichait bien de ce que cela faisait, et ne voulait pas le savoir. Elle ne voulait pas être libre et triste, elle voulait être libre et heureuse. Si elle l'avait pu, elle aurait crée de ses mains un monde où chacun aurait eu sa place, et où personne n'aurait eu à souffrir de la faim ou du froid. Ce désir pouvait sans doute paraître quelque peu étrange lorsqu'on connaissait l'identité de celle qui l'avait formulé, mais il n'en restait pas moins tout à fait sincère. Dans un monde parfait où tout le monde aurait été heureux, elle l'aurait été aussi. Un monde où son père et sa mère seraient toujours à ses côtés, un monde dans lequel elle n'aurait plus cette fichue maladie qui l'empêchait de courir, un monde dans lequel son frère n'aurait pas à s'inquiéter de sa santé et s'occuper d'un Royaume entier et de la guerre qui l'opposait aux terres voisines. Une chimère qui ne verrait jamais le jour, cependant. Si Bara se permettait de se laisser aller à de douces rêveries, parfois, elle n'oubliait jamais de redescendre sur terre le moment venu. Sûrement ne l'aurait-elle pas fait si personne ne l'attendait au château. Quand plus personne ne vous attendait nulle part, il n'y avait aucune raison de se lever le matin ou sortir la tête de l'eau du lac dans laquelle on se l'était plongée.

La liberté était donc ce qu'elle enviait chez ce dénommé Claid. Peut-être son aisance à s'adapter à la situation, aussi. Si on ne prenait pas le temps de le regarder vraiment et passait en coup de vent, on pouvait facilement arriver à la conclusion qu'il n'était rien d'autre qu'un imbécile heureux, stupide et souriant, qui n'arrivait à prendre aucune situation au sérieux. Beaucoup de personnes ne cherchaient pas à connaître les autres en profondeur, se contentant d'étiquettes qu'ils leur collaient sur le front dès la première rencontre, étiquette fabriquées à l'aide de préjugés. Bara l'avouait, elle aussi faisait cela, parfois. Mais elle n'en avait pas honte, toutefois, ce n'était pas pour elle un réflexe, au contraire de certains autres. Elle se demanda, l'espace d'un instant, si Claid jugeait aux apparences sans chercher à savoir ce qu'il pouvait bien y avoir à l'intérieur d'une personne. L'apparence n'était qu'une couche externe sans valeur, et si elle apportait bien du bonheur à certains, d'autres en souffrait tout au long de leur vie. Elle ne savait pas ce que cela faisait que d'être désigné du doigt et poursuivi par des rires moqueurs à cause d'un visage un peu trop ingrat, étant jolie, elle n'avait jamais eu à souffrir de ce déplaisant mal. Claid, lui, était loin d'être laid également. Mais il possédait un cache-oeil, et cela pouvait, de l'avis de la Princesse, lui attirer quelques moqueries de la part de ses congénères. Comment avait-il bien pu se faire une chose pareille, d'ailleurs? Avait-il perdu son œil, cachait-il une cicatrice, ou autre chose? Était-ce du à un accident? Quelle sorte d'accident? Bara brûlait d'envie de le savoir. Mais par respect pour lui, elle ne lui demanda rien, ne laissant aucune de ses émotions transparaitre sur son lisse et pâle faciès. Il avait bien assez à faire à éviter ses boules de neige, c'eut été franchement inutile et irrespectueux de le noyer de questions en plus de cela.

Comment il allait éviter les deux projectiles immaculés qu'elle venait de lui lancer, elle n'avait pas eu le temps de beaucoup y réfléchir. Peut-être pensait-elle confusément qu'il allait simplement se décaler sur le côté et ainsi dévier de leur trajectoire, mais pour sa plus grande surprise, ce ne fut pas du tout le cas. Dans un geste qui tenait du réflexe aux yeux de la jeune fille aux couettes, le Soldat avait placé la tête de son arme au sol, dans la neige épaisse, et s'était accroché au manche de son arme, qui venait de s'allonger, se projetant dans les airs d'un seul coup, faisant reculer d'un pas Bara, qui fixait son compagnon de jeu, maintenant à cinq ou six mètres du sol enneigé, ses yeux d'améthystes grands ouverts. Ah ça, il ne fallait pas être cardiaque pour s'entraîner avec lui, c'était une chose certaine! Après le coup du grossissement, voilà qu'il lui faisait le coup de l'extension. Pour Bara, qui n'avait jamais pu pratiquer de magie de par son métissage trop marqué et sa maladie, tout ceci lui paraissait extraordinaire. Elle était jalouse. Il pouvait pratiquer ce qu'elle ne pouvait pratiquer avec une certaine aisance, bien que tout ceci n'était visiblement pas encore tout à fait maîtrisé. Aaaah, il l'énervait...Elle croisa ses bras sur sa poitrine, le suivant des yeux alors que le manche retrouvait peu à peu sa longueur initiale, jusqu'à ce qu'il touche la terre et ne range son maillet, à présent devenue aussi minuscule et inoffensif qu'un crayon sans mine.

Et le pire dans tout ça était qu'elle ne pouvait pas même lui reprocher quelque chose. Il les avait évitées, il avait bien fait ce qu'elle lui avait demandé de faire.

"Et maintenant?"

Bara haussa un sourcil, ne quittant pas le soldat des yeux. Ah, il souriait, maintenant? Elle avait très envie de lui faire manger son maudit sourire. A cette pensée, un sourire vint étirer ses fines lèvres, et elle lui rendit ce sourire taquin, se baissant de nouveau pour amasser la neige entre ses mains et en faire une boule, comme les fois précédentes. Une fois que ce fut chose faite, elle laissa son sourire s'agrandir, et s'approcha de Claid, ses bottes s'enfonçant dans la neige éclatante à chaque fois. Une fois les quelques mètres qui les séparaient parcourus, Bara se planta devant Claid, le regarda dans l'œil quelque seconde, toujours souriante, avant de ne lui écraser très délicatement la boule de neige qu'elle venait de façonner en pleine figure. De cette manière, elle était sûre qu'il s'en prendrait au moins une. Frottant ses mains gantées l'un contre l'autre pour en enlever les résidus de poudreuse, elle éleva la voix, n'ayant pas bougée de devant Claid, un ton satisfait animant chacun de ses mots:

« Maintenant, vous venez de goûter à la neige de la frontière. Est-elle plus goûteuse que celle des terres centrales? »

Cette question était proprement stupide, comme s'il avait déjà goûté à la neige des terres centrales...Quoique, quand on s'amusait à passer d'un côté à l'autre d'une ligne imaginaire, on pouvait très bien s'être amusé à avaler les flocons. Ou la neige qui s'était déposée sur les branches des arbres. Bara le savait pour l'avoir elle-même fait un nombre incalculable de fois étant enfant.

« Vous faites grandir votre maillet, vous l'allongez...Vous êtes bien habile avec la magie, dites moi. »ajouta-t-elle, sans que son sourire ne disparaisse pour autant de son visage.

Oui, plutôt habile. Si l'on exceptait bien entendu le fait qu'il avait du l'élever plus qu'il ne l'avait voulu, tant de mètres n'était pas nécessaire pour éviter deux malheureuses boules de neige. Après, il avait très bien pu le faire exprès, elle n'était pas dans sa tête, et jamais ne prétendrait savoir ce qu'il pensait et le pourquoi ou le comment de ses actions.

Est-ce que Claid avait réussi sa vie? Cette simple question à laquelle on répond aussitôt au moment où on se la pose était resté longtemps dans la tête du rouquin, et y logée toujours d'ailleurs. Si on la lui avait posé alors qu'il venait de stopper un conflit dans l'une des nombreuses rues d'Imura, sans doute aurait-il répondu positivement avec l'un de ses éternel sourire. Si on la lui avait posé alors qu'il fixait le plafond de son dortoir, sans doute la réponse se serait fait plus longue à sortir... Qu'est-ce que l'on appelé réussir sa vie? Avoir eu une enfance heureuse, avoir fait de brillantes études avec un excellent emploi à la clef, s'être fait des amis fidèles, avoir trouvé l'amour et fait deux enfants beaux et intelligents avec et vivre heureux dans une magnifique maison? Même une fois dans le cercueil, les muscles de vos lèvres continueraient d'être tirés tellement vous seriez mort en pensant que le court instant que vous avez passé sur Terre était tout bonnement parfait. Oui, en quelque sorte, c'était ça "réussir sa vie". Or, peu de monde remplissait tout, du fait qu'il manquerait toujours et éternellement une chose non achevée. Dans le cas Firestone, rien n'était fait: son enfance avait été un calvaire, né orphelin avec toutefois un tuteur affectueux mais beaucoup trop sévère. Il avait été rejeté par sa différence physique mais aussi par sa façon de vivre, du fait que des amis, il n'en avait aucun. Après, il s'agissait de ne pas confondre 'ami' et 'connaissance'. Les études, il avait fréquenté un très court laps de temps plusieurs écoles, mais le plus gros avait été enseigné par son responsable légal. Ce qui faisait que sa culture générale était plutôt élevée, mais qu'il ne deviendrait probablement jamais médecin. Et la vie de famille, il n'y avait rien de fait et cela resterait comme tel, c'était un pressentiment pour lui. En gros, Claid aurait répondu quelque chose de très vague, après avoir fait patienter la personne curieuse une bonne dizaine de minute. Sans doute aurait-il répondu "je n'en sais rien, vu que je n'en suis pas encore à la fin" ou plus sérieusement "non, du moins pour l'instant". Ça faisait plusieurs années que le jeune homme avait cessé de se demander pourquoi l'avait-on appelé à vivre il y a maintenant 17ans. Le monde était plein de question, et même si chacune d'elle avait sa réponse, la plupart ne serait jamais dévoilée et Claid avait mis un moment avant de s'en rendre compte, mais avait fini par le comprendre. Après, il possédait lui aussi sa propre définition de "réussir sa vie". Dans l'immédiat, pour s'approcher tout les jours un peu plus de ce but, il ne devait pas perdre son emploi et même essayait d'en être félicité, ce qui avait l'air de se passer -plutôt ironiquement d'accord- face aux défis de la jeune Bellanca. Était-ce suffisant? Pour le moment oui, et c'est justement ce qui importait beaucoup au jeune garçon: le moment présent. Il n'était donc pas étonnant que l'on réponde instinctivement "oui, je l'ai réussie" lorsque nous étions heureux pour avoir sauver son pays d'une attaque ou d'avoir rattrapé à temps un banal objet en verre. Être heureux nous faisait faire ou dire des choses stupides que nous trouverons inutiles plus tard, ou même en être gêné. Pour Claid, c'était le cas, et il le montrait à son interlocutrice par de nombreux sourires qui n'avaient aucunement leur place ici et ne faisaient que lui donner un air idiot. Le pire, c'est qu'il s'en rendait compte, que le monde entier le prenait pour un imbécile heureux parce qu'il affichait une mine plus réjouie que les autres par les temps qui courent. Qu'une de ses plaisanteries en ferait sourire certains, grimacer d'autres, c'était comme ça et il n'y pouvait strictement rien. Il n'y avait rien de plus abstrait qu'un sourire, il pouvait paraître faux ou vrai et l'être ou ne pas l'être, mais personne ne cherchait à le savoir, tout le monde attendait que cela soit évident pour s'en faire la remarque. Mais celui qu'affichait Claid au moment de refaire face à sa princesse était inclassable. Sourire était quelque chose qu'il s'obligeait à faire étant plus jeune, et cela était devenu au fils des années un automatisme maintenant incontrôlable. Il ne souriait pas pour les beaux yeux de sa dirigeante, ni pour la faune alentour qu'ils devaient intriguée, il souriait pour lui-même parce qu'il était tout simplement satisfait, satisfait d'avoir réussie quelque chose qui avait eu de l'importance à ses yeux.
Toutefois, quoi de plus normal que le fait que Bara Bellanca pense que ce dernier lui était directement adressé? Car il avait tout pour l'être après tout. Bonne direction, seule personne à des kilomètres à la ronde et situation qui le laisse deviner. Mais en voyant les fines lèvres de sa cadette s'étirer pour faire elles aussi place à cette expression, Claid se demanda un court instant si il n'aurait pas dû s'abstenir et le garder pour lui celui la. La famille royale était réputée pour avoir un humour qui ne faisait rire qu'eux... Il semblait avoir oublié à qui il avait affaire jusque là et avait le pressentiment qu'il allait se faire rafraichir la mémoire. Au pire, il devrait ressortir le même scénario qu'il avait fait à la première rencontre avec son général. Peut-être que le mieux était effectivement d'obtenir un avis neutre des autres plutôt que de chercher à en avoir un positif à tout prix. Et donc, la jeune fille s'agenouilla une fois de plus dans la neige pour reformer une énième boule de neige. La bouche de Claid forma une ligne droite, à la fois gêné, déçu, rassuré... Encore une esquive à réaliser, hein? Lui qui pensait avoir découragé pour de bon l'adolescente, c'est comme si on faisait à nouveau tourner la roue de la fortune... Le soldat se positionnait déjà sur le qui-vive avant de rester immobile devant le fait que Bara s'approchait à pas lents et réguliers vers lui avant de se planter juste devant, la distance qui les séparait étant considérablement réduite par rapport à leur position initiale. Son étrange sourire toujours intact, elle le fixa alors droit dans les yeux. Ce moment sembla durer une éternité pour Claid qui ne savait pas où la sœur de son roi voulait en venir exactement. Son regard profondément concentré sur ses iris étrangement violacées, éclairées par la lumière vive de la journée et contrastées par une couleur de peau aussi clair. L'idée de s'approcher d'avantage pour examiner avec plus de précision de quelle autre couleur pouvait bien constituer ses yeux ne lui aurait pas déplu, mais il s'abstena. De un, parce qu'il préférait ne pas s'aventurer sur ce terrain, de deux, parce que cela lui semblait tout à fait impossible vu que son unique œil vert ne lui offrait plus rien à voir du tout. Son visage rentra en contact avec une matière gelé et humide. Il émit un petit bruit plaintif tout en s'essuyant avec sa main. Ce n'est que là que la boule de neige récemment formée lui revint à l'esprit, et il se maudit intérieurement d'avoir baissé sa garde, berné par le joli regard de sa princesse. Les femmes sont sournoises, c'est pas nouveau, et pourtant, il s'était fait avoir, lui. Bon, il admettait qu'il avait peut-être, très légèrement, dépassé les bornes, mais ce coup en traître, c'était vraiment injuste!

« Maintenant, vous venez de goûter à la neige de la frontière. Est-elle plus goûteuse que celle des terres centrales? » Déclara-t-elle alors, satisfaite.

Claid stoppa son geste une demi-seconde à l'entente des deux mots "terres centrales" avant de s'enlevait les restes de neige de sur son visage sans cesser de le garder baisser. Non, elle ne pouvait pas savoir d'où il venait précisément, impossible. Sans doute devait-elle faire allusion au fait qu'il sautait d'un pied sur l'autre avant même qu'elle ne débarque. Il ne voyait pas ce qu'il y avait de drôle là-dedans, si son objectif avait été de goûter la neige d'Hatès, il aurait probablement attendu 1heure ou la fin de journée pour avoir droit à ce qu'il neige et ainsi en goûter de la fraichement tombé du ciel -de toute façon, il l'a déjà fait! xD- Il ne comptait pas répondre à la question, ce qui ne surprendrait pas Bara pour sûr, et resta donc encore un moment à faire semblant d'être stoïque tout en se frottant sa paupière.

« Vous faites grandir votre maillet, vous l'allongez...Vous êtes bien habile avec la magie, dites moi. »

Le rouquin se figea un moment avant de redresser la tête vers son interlocutrice, lui adressant un regard plus ou moins étonné. Ça sonnait comme un compliment mais il n'aurait su dire si c'était sincère ou non, et avait d'ailleurs cessé de chercher... Mais lui? Habile avec la magie? C'était la meilleure celle la... Étant un mélange de différentes races, Claid possédait des pouvoirs plus ou moins remarquables. Par exemple, il maîtrisait le feu, arrivait à lui donner une forme plus ou moins convenable avec telle ou telle proportion, mais c'était tout. Il avait beau avoir le don de maîtriser d'autres éléments comme le vent, le bois ou l'électricité, il était loin de les maîtriser comme il se devait, et préférait d'ailleurs ne pas les employer dans des lieux fréquentés. Ce qui était normal après ce qu'il avait fait à un certain moulin à vent sur route autrefois... Mais passons. Grandir, rapetissir, allonger... C'était des petits tours de passe-passe, c'était aussi facile pour lui qu'à un écuyer de seller un cheval. Alors il dû avouer qu'il ne s'attendait pas à étonner sa supérieure avec ça... Mais ce qu'il le surprit encore plus, c'est que la jeune Bellanca soit aussi curieuse à propos de la magie. Même si on ne le lui avait pas dit, Claid avait su aussitôt à leur rencontre qu'elle était métisse, alors il en déduit que quelque chose clochait. Il fronça légèrement les sourcils en affrontant à nouveau le regard améthyste. En fait, il n'y avait rien à dire sur ce genre de chose. Il fit alors semblant de ne pas paraître étonné et se frotta alors énergiquement sa main devenue bleue avec son autre toujours sèche... Quelle plaie... Comment Bara avait-elle pu faire autant de boules sans être découragée par le froid qui attaquait maintenant la main de Claid? Si lui aussi pouvait s'offrir un manteau en fourrure plutôt qu'une écharpe en laine aussi...

"Je manie cette arme depuis mes sept ans... Alors vous savez, je ne me considère pas vraiment habile avec la magie..." Il cessa toute action pour se concentrer pleinement sur le visage de sa cadette. "En fait, je suis pas doué du tout dans ce domaine." Avoua-t-il sérieusement.

Bon... Ça c'est dit. La franchise le coulera un jour, c'était certain. Mais autant dire la vérité, épater quelqu'un par des mensonges nous retombé toujours dessus en général donc... Il n'allait pas tenter le diable, hein. Il fit s'échapper volontairement de la chaleur de sa bouche dans l'optique de toujours réchauffer sa main nue, avant de se pencher légèrement le visage vers la plus jeune des Bellanca dans le but d'être environs à sa hauteur, le regard beaucoup moins vivace que il y cinq minutes.

"Vous ne savez pas pratiquer la magie?" Demanda-t-il en se doutant plus ou moins de la réponse qu'elle pourrait lui fournir.

C'était mathématiquement impossible. Elle était métisse, Claid sentait et reconnaissait parfaitement ses individus parce qu'il en était lui-même un, et Bara n'avait pas fait exception bien sûr. Et ce genre de personnes possédaient des pouvoirs surnaturels à défaut des humains purs. Du fait que même si ils étaient faibles, la jeune fille en face de lui en possédait, il en était aussi sûr que deux et deux font quatre... Juste qu'elle ne savait peut-être pas s'en servir? Jusque là, il aurait compris, le seul hic était qu'elle faisait parti de la famille qui dirigeait Hatès, et donc, dans ce cas là, qu'elle en aurait donc bien besoin...