Where is the love? [Ouais,bha j'en ai marre d'attendre.XD.PV Emily.8D]

Ce n'était pas que ce bruit l'irritait. Ce n'était pas qu'elle aurait voulu assécher cette immense étendue d'eau en perpétuel mouvement pour le faire cesser, de toute façon, elle n'en aurait pas été capable. Non, ce n'était pas ça, et Emily écoutait la mer continuait son concert, ses yeux fixant sans les voir les vagues qui venaient lécher le sable doux, juste devant elle. La blessure sur sa main gonflait, et s'infecterait si elle ne la soignait pas en rentrant. Avaient-ils encore de quoi soigner chez eux? S'ils n'avaient plus rien, elle irait en acheter à la ville, ce n'était pas important. Pas important du tout. Ce genre de choses se rachetait, au contraire d'une vie, qui une fois partie ne pouvait plus jamais revenir. Levant distraitement son regard fixe vers le ciel grisâtre encombré de nuages, la jeune démone se demanda s'il allait pleuvoir, auquel cas elle devrait attendre avant de reprendre la route. Kyle ne voudrait pas de son manteau mouillé, il fallait qu'il soit sec. Sa mère la disputerait d'avoir sali le sol fraîchement lavé. Et son père se tairait, comme le fantôme invisible qu'il était depuis trois ans, vaquant à ses occupations sans un mot, sans un bruit. Emily était accoutumée au silence presque morbide de son domicile, et elle aurait voulu que ce silence soit le même ici, près de cette mer qui n'en avait jamais assez de vivre et exister. Ces oiseaux, ces stupides volatiles sans la moindre parcelle d'intelligence faisaient trop de bruit. N'en avaient-ils pas assez de parcourir les cieux sans but? N'auraient-ils pas plutôt préféré se poser et mourir, rendant leur dernier souffle dans un vague murmure éraillé? Emily les aurait aidé à mourir si elle avait été assez grande, suffisamment pour pouvoir en saisir un dans sa main rien qu'en tendant sa main vers le ciel. C'était agaçant d'être aussi petite, elle aurait voulu être plus grande, impressionnante. Effrayante. Passant doucement une main sur sa joue froide, la jeune fille aux cheveux auburns laissa son regard écarlate se reposer sur l'étendue grise recouverte de brume qui lui faisait face. Le vent se levait progressivement, soufflant sa froide brise sur la campagne délavée. Il faisait froid, mais au fond, elle savait que ça lui importait peu, qu'il fasse chaud, froid, ou quoi que ce soit. Elle grelottait...Levant sa main devant elle, elle vit qu'elle tremblait. Un peu. Pas beaucoup. C'était presque imperceptible, comme mouvement. La jeune fille resta là, fascinée, à observer sa main.

C'était comme si elle découvrait quelque chose de nouveau. Voir ce petit mouvement saccadé la secouer lui procurait un plaisir malsain, la conviction qu'elle n'était ni faite de bois ni faite de ce vent qui gémissait à ses oreilles. Si elle se coupait, elle saignait, et si elle avait froid, elle tremblait. C'était des réflexes que seuls les êtres vivants pouvaient se vanter de posséder, et qu'elle était fière de posséder, dans un sens. Elle n'était pas une vulgaire pierre sans la moindre conscience, elle n'était pas une stupide fleur qui se courbait trop vite sous le poids de la pluie qui tombait parfois si brusquement sur la campagne. Elle était forte, vivante. Elle ressentait le froid sur sa peau, et son corps réagissait en conséquence. Le sang coulait quand elle se blessait, c'était...C'était...

Emily laissa sa main se reposer sur le sable humide, son sourire ayant de nouveau disparu. C'était? Qu'est-ce que c'était, au juste? Elle était vivante. Forte. Elle n'était pas une proie, pas une vulgaire bête qui se tairait quand elle entendait du bruit. Elle était au dessus de tout ça, un stade au dessus. Une ou deux cases d'avance. Elle pouvait s'en féliciter, elle n'était pas inutile. Regardant l'écume que l'eau salée apportait avec elle de son lointain voyage, elle eut envie de l'écraser violemment sous son poing crispé. Quoi, quoi? Qu'est-ce que c'était? Ce qu'Emily détestait ne pas trouver ses mots, ne pas arriver à les associer à ce qu'elle pensait, ressentait. Cette incapacité sonnait comme une défaite, une anormalité. Parce que la jeune femme aux yeux de sang était dotée d'une conscience, d'une intelligence, elle aurait du en être capable. C'était dans ces moments-là qu'Emily songeait qu'un caillou avait du grippé les rouages de son cerveau. Mais elle cessait vite de s'en préoccuper, car tout lui passait bien vite; Les inquiétudes, c'était pour les faibles, et les interrogations qui ne trouvaient pas de réponses, pour les stupides et les indécis. Et le fait était que la Démone aux trop longs cheveux n'était rien de tout cela. Non, non. Elle n'était rien de cela, vraiment.

"Je l'entends. Et je me le demande aussi. Je ne sais pas. Je sais juste que les cris sont beaux, alors je continue d'en provoquer. C'est agréable à entendre. Tu ne trouve pas?"

Personne ne sait, pensa Emily en grattant le sable sans vraiment y faire attention. Personne ne sait, alors que tellement de personnes sont intelligentes. Enfin, on ne nous a jamais apprit à saisir l'insaisissable, à deviner l'indicible. Ce sont des choses qu'on ne peut savoir sans qu'on nous le dise. Les animaux n'étaient pas dotés du pouvoir de réflexion. Les hommes l'avaient, mais n'étaient pas capables de deviner ce qui échappe au regard. Il devait y avoir un stade au delà du leur, celui dans lequel leur Reine se situait, l'ultime phase qu'on ne saurait prétendre atteindre. Vers de terre sans aucun mérite. Au fond, tout ce qu'ils avaient, c'est ce que la nature avait bien voulu leur offrir à la naissance. Ils ne gagnaient rien par eux-mêmes. Au fond...

Ils n'étaient que des pions qui vivaient au dépend de l'invisible.

« Personne ne sait, fit-elle, ses yeux toujours vissés sur l'eau grise qui allait et venait dans un petit murmure, elle agonise. La mer. Mais elle ne meurt pas, elle agonise juste. Depuis tant de temps. »

Elle s'arrêta, laissant un petit rire passer le cap de ses pâles lèvres entrouvertes. Elle agonise! C'était tellement pitoyable. Souffrir là, depuis tant de temps, depuis l'aube de tout, sans pour autant pouvoir mettre un terme à ses souffrances. Pitoyable, pitoyable.

« On en provoquera jusqu'à ce qu'on trouve, continua-t-elle, son rire cessant doucement, c'est tout ce qu'on peut faire, continuer. C'est tout ce qu'on sait faire. On sait rien faire d'autre. »

Elle marqua une courte pause, durant laquelle seul le bruit du vent et des vagues se fit entendre. Appuyant ses mains contre terre, elle se releva, se tournant légèrement vers Azure. Il avait des cheveux clairs, pour un Démon. On s'était peut-être moqué de lui. Quelle importance? Ceux qui cèdent, ce sont les faibles. Ceux qui se plaignent, ce sont les faibles. Et il n'était pas faible du tout, elle le savait. Rien qu'à le regarder, n'importe qui l'aurait su.

« Tu sais faire autre chose qu'avancer, toi? »

[En fait, j'adore RP avec Emily.^^-]

Invité

Qu’est ce qu’elle était pour lui ? Pourquoi est ce qu’il avait éprouvé ce besoin de venir la voir, de partir d’assez loin pour revenir près du village où lui-même avait passé son enfance ? Il n’en savait rien. Il était venu pour le savoir, d’ailleurs. Sa vie dans la ville portuaire n’était qu’un lointain souvenir pour lui. Même si ses parents devaient sans doute se trouver là à l’heure actuelle, ça n’était pas pour eux qu’il était venu. De toutes manières, il n’avait aucune raison de les voir, et on ne fait jamais rien sans raison, c’était stupide. Peut être que parfois il laissait son corps parler, toutefois. Ou pas. Il ne savait pas. Il ne savait pas grand-chose, quand il y réfléchissait d’ailleurs. Pourtant, il n’était pas stupide, loin de là. C’était un fin stratège et un homme plutôt intelligent quand on considère qu’il s’agit avant tout d’un soldat et d’un tueur, plutôt que d’un homme important dans le système politique de Sal’ahë. Enfin, système politique… Azure ne croyait pas à cela, en fait. Il n’y avait pas de système politique, simplement Melfia au sommet, et tous les autres habitants du pays à son entière disposition. Azure également, bien entendu. D’ailleurs il était même le premier à réagir quand sa Reine avait besoin d’un quelconque service. Oh, elle pouvait se débrouiller toute seule, aucun doute la dessus. Melfia pouvait tout faire. Mais elle n’en avait pas spécialement l’envie, et le fait que Azure puisse rendre service à sa souveraine lui faisait… Plaisir ? Il ne savait pas très bien. En tout cas, il se sentait à sa place à servir Melfia. Il se sentait à sa place lorsqu’il plongeait sa lame dans le ventre d’un de ses nombreux ennemis. Si on pouvait vraiment parler d’ennemi avec lui, le terme « victime » serait peut être un peu plus exact. Il se sentait à sa place dans tout cela, mais un élément imprévu était venu le déstabiliser quelques temps plus tôt. Un élément qui portait le nom, très agréable à l’écoute il est vrai, d’Emily Verrona. Cette jeune démone avait provoqué un étrange sentiment chez Azure. Il se sentait toujours à sa place en servant Melfia, en fauchant des vies avec ses armes, en exécutant les ordres donnés par sa Reine sans jamais rechigner, sans jamais broncher, juste en acquiesçant les ordres, et ensuite en les exécutant. Mais maintenant, il y’avait autre chose. Il n’arrivait pas à s’enlever de la tête ce parfum, cette sensation qu’il avait ressenti lorsqu’ils s’étaient enlacés. Cette sensation qu’il avait ressenti lorsqu’elle avait effleuré ses lèvres. Lorsque lui-même l’avait prise dans ses bras, pour ensuite vérifier quelque chose. Il avait ressenti vraiment quelque chose de bizarre en l’embrassant, surtout lorsqu’elle lui avait rendu son baiser. Une sorte de fourmillement, de picotements partout dans son corps. Il avait même faillit avoir des spasmes, tellement cette sorte de décharge électrique était forte. Elle s’était propagée doucement dans son corps, pour finir par atteindre son cerveau. Et là, il se l’était demandé. Pourquoi ? Pourquoi est ce qu’il ne pensait qu’a cela ? Pourquoi est ce qu’être près d’elle, parler avec elle, la serrer contre lui, pourquoi tout cela était devenu si… Plaisant ? Pas plaisant comme le plaisir ressenti en ouvrant le ventre d’un pauvre crétin qui avait eu le malheur de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, pas comme le plaisir de voir Melfia lui ordonner quelque chose, qu’il s’applique à accomplir à la lettre. Non, c’était autre chose. Et ça n’était pas quelque chose qu’il voulait perdre, non. C’était un sentiment agréable. Elle comptait pour lui, désormais. Quoi qu’il puisse en dire, et quoi qu’elle-même puisse en dire, Emily Verrona était à présent l’une des personnes envers laquelle Azure Kite ressentait le plus de respect et d’admiration pour l’heure. Voire même, d’affection. Affection ? C’était possible pour quelqu’un comme lui d’être prit d’affection pour une personne ? Il ne savait pas trop. Il ne le pensait pas, en fait. C’était juste une petite hypothèse. En tout cas, ce qu’il ressentait pour Emily, ça n’était pas le besoin d’obéissance absolue qu’il avait envers Melfia. Ca n’était pas cette jalousie teintée de reconnaissance qu’il avait pour ses parents. Non, c’était quelque chose de plus… Proche que cela. De plus profond. Azure savait qu’il pouvait vivre sans ses parents. Il savait aussi que Melfia était indispensable à son existence, mais qu’il pouvait s’occuper quand elle ne lui donnait pas d’ordres. Mais Emily… Il voulait être avec elle. Pour longtemps. Pour très très longtemps. En regardant la mer, Azure se dit que cet élément était décidément bien étrange. Il était condamné à partager son espace avec la berge, la place et le sol pour l’eternité. Peut être s’entendaient t-ils bien ? Peut être qu’ils ne pouvaient pas s’entretuer ? Azure se demanda si il pouvait avoir le même destin avec Emily. Si un jour, il avait envie de la tuer de ses propres mains. L’idée lui parût étrangement saugrenue. C’était étrange, non ? Il ne rechignait jamais à tuer quelqu’un d’ordinaire. Pourtant, le fait qu’Emily disparaisse lui laissait un vide. Il ne savait pas ce qu’il ferait si Emily venait à disparaître, non. Il savait simplement que ce n’était pas quelque chose de bien. Que si elle venait à disparaître, quelque chose qui lui appartenait disparaîtrait avec elle. Qui lui appartenait à lui, et pas à elle. Du moins, pas à l’origine. Et il ne voulait pas être incomplet. Il était très bien comme il était, il ne voulait pas perdre une part de lui-même. Et donc, il ne voulait pas perdre Emily.

Peut être que c’était ça la vraie réponse à sa question ? Peut être que sans vraiment le vouloir, Emily lui avait volé quelque chose qui lui appartenait. Une partie de lui, qui était à présent entre les mains d’apparence fragiles, mais pourtant si sanglantes de la jeune démone aux longs cheveux bruns. Elle détenait quelque chose que Azure n’avait plut. La question était : avait t-il envie de le récupérer ? Il ne savait pas trop. D’un coté, il voyait mal le fait que quelqu’un d’autre que lui-même puisse être une part de lui. Mais d’un autre coté, c’était Emily. Et si il y’avait bien une personne de confiance en cette terre, c’était elle…. Azure mit un certain temps à réaliser ce qu’il venait de penser. Personne de confiance ? Il avait confiance en elle ? Est-ce que c’était seulement possible ? Est-ce qu’il pouvait avoir confiance en quelqu’un ? Il n’avait confiance qu’en Melfia, elle était la seule apte à pouvoir tout juger du fait qu’elle était omnisciente. Mais Emily ? Emily n’était pas une divinité, comme l’était Melfia. Emily n’était qu’une démone, parmi tant d’autres, avec simplement plus de courage pour jouer un jeu étrange avec le Second de la Reine… Azure la regarda un instant, alors qu’elle murmurait quelque chose, qu’il parvint à entendre malgré le bruit du vent et des vagues autour d’eux.

« Personne ne sait, elle agonise. La mer. Mais elle ne meurt pas, elle agonise juste. Depuis tant de temps. »

Elle ria ensuite. Azure ne savait pas pourquoi, mais il souriait. Il souriait en la voyant, de dos, rire dans cette atmosphère. Ce rire n’avait rien de joyeux. Il était froid, sans âme, avec juste l’envie profonde de faire souffrir quelqu’un présente dans son ton. Pourtant… pourtant Azure souriait en l’entendant. Il eu vaguement envie de rire, mais ne le fit pas. Oui, la mer agonisait. Oui, elle le faisait depuis longtemps. C’était bien l’agonie, c’était peut être le meilleur passage avant la mort. En voyant la terreur se figer sur le visage de ses victimes, Azure se sentait vivant. Pour se sentir vivre, il voulait tuer, c’était ainsi qu’il était fait. Mais entendre ce rire… Le faisait sourire. Etrange, non ?

« On en provoquera jusqu'à ce qu'on trouve, c'est tout ce qu'on peut faire, continuer. C'est tout ce qu'on sait faire. On sait rien faire d'autre. »

Le rire d’Emily s’évapora dans le bruit constant des vagues, alors que le Second de Melfia Hider regardait le dos de la femme qu’il pensait… Peut être… Pour laquelle il éprouvait quelque chose de spécial, c’était sûr. Elle se retourna doucement vers lui, lui offrant la vue de son visage une nouvelle fois. Ses joues, ses lèvres, ses yeux. Tout lui sembla soudainement d’un intérêt décuplé. Il ne savait pas pourquoi elle était si intéressante à ses yeux. Elle n’était pas si exceptionnelle, non ? Des cheveux bruns, des yeux rouges comme chez la plupart des démons, un visage gracieux mais pas aussi exceptionnel que d’autres… Et pourtant, Azure la trouvait vraiment belle. Pas aussi belle que Melfia bien entendu, dont la simple main était encore plus belle que la plus belle des œuvres d’art, mais d’une beauté qui le déstabilisa un court instant. Il cligna des yeux, fixant les yeux rouges d’Emily perturbé. Il voulait faire quelque chose, il voulait être près d’elle. Elle le regardait. Il ne savait pas ce qu’elle pensait de lui. Il espérait tout de même que c’était une chose similaire à la sienne. Qu’ils soient deux à se poser ces questions pouvait peut être apporter une réponse.

« Tu sais faire autre chose qu'avancer, toi? »

Azure la regarda, un moment, avant de cligner deux fois des yeux, penchant sa tête sur le coté pour réfléchir à cette question. Faire autre chose qu’avancer. La question était dure, pourtant, il devait fournir une réponse. Emily lui parlait directement, et pas en s’adressant au vide comme elle le faisait depuis le début. Elle lui parlait à lui, il aimait cela. Il existait pour elle, il n’était pas invisible. Il voulait avoir de l’importance pour elle. Il voulait qu’elle se pose à son sujet les mêmes questions que lui se posait sur elle. Il voulait tout ceci, et plus encore. Mais ignorait pourquoi. Tout ce qu’il savait, c’était qu’il le voulait. Et que donc, il devait répondre.

« Je sais chercher. répondit-il après un petit temps de réflexion. Je sais obéir. Mais tout ça, c’est pareil qu’avancer. Avancer, c’est simplement faire ce qu’on doit faire. Je dois chercher, et je dois obéir. Donc je ne sais pas faire autre chose qu’avancer. Je ne pense pas. »

Il baissa la tête un instant, se demandant si elle le considérerait comme moins fort qu’il ne l’était si il lui avouait cela. C’était étrange, non ? Il prenait en compte les sentiments d’Emily vis-à-vis de lui. Il voulait avoir une image valorisée auprès d’elle. Pourquoi ? Et surtout, en quoi cela lui servirait t-il ? Il n’en savait rien. Il voulait juste… Qu’elle le remarque plus. Qu’elle s’occupe de lui, parce que lui, il voulait s’occuper d’elle.

« J’avancerais alors. Je continuerais d’avancer, jusqu'à trouver. Je veux avancer. Avec toi ? »

Les deux derniers mots, il les avait prononcés de maniére interrogative, car il ne savait pas si c’était vrai. Il voulait avancer avec elle ? Il voulait passer du temps avec elle ? Il ne voulait pas la quitter ? Il ne savait pas. Il regarda la main d’Emily un court instant, blessée et gonflée par le sel. Il appréciait la vue de son sang sublime. Pourtant, il sentit un léger malaise. Il ne voulait pas, ne voulait vraiment pas, qu’elle soit blessée. Qu’elle ait mal. Il voulait qu’elle…. Il ne savait pas. Il ne voulait pas qu’elle ait mal, déjà. Azure regarda Emily, puis la mer qui continuait son infernal va et vient. Il poussa un soupir, sans raison particulière, juste parce que les êtres poussaient parfois des soupirs. Un reflexe peut être.

« Tu saigne. Tu veux que je te soigne ? »

Il avait proposé ça, juste parce qu’il le voulait bien. Soigner Emily, c’était une priorité. Et puis, peut être qu’elle le considérerait un peu plus avec ça. Il avait le matériel médical pour la soigner dans sa besace, il le savait. Il avait toujours cela, juste en cas de besoin. Juste parce qu’il y’avait toujours un risque de saigner, et que son sang à lui, il ne voulait pas le voir. Si quelqu’un voyait son sang, c’était qu’il avait subit une défaite face à cette personne. Et ça, il ne l’acceptait pas. Il n’accepterait sa défaite que face à deux personnes. Melfia, et Emily. Les deux seules qui avaient le droit de voir son sang, autant qu’elles le désiraient. Les autres, mourraient avant de pouvoir en apprécier la couleur écarlate. Puis, il se soignait, seul. Car il n’avait pas mal. Il voulait juste arrêter de saigner.

Azure cligna des yeux, replongeant son regard bleu dans celui, rouge, d’Emily. Le rouge. C’était décidément magnifique comme couleur. Il aurait put passer toute sa vie à contempler le monde vut par Emily. En rouge. En rouge, total. Couvert du sang des faibles. La mer, rouge. Le ciel, rouge. La pluie, rouge. Tout serait rouge. Puis blanc. Blanc comme la mort.

[Tu viens juste de t'en apercevoir?XD

Moi j'ai eu du mal pour celui là avec Zuzure... J'ai surtout parlé d'Emily en fait. On sent le type qu'a de l'inspi que dans ce domaine...XDDD]

Emily sentait, confusément, que quelque chose n'allait pas chez elle. Comme une peinture à laquelle il manquerait un élément: On sentait que quelque chose manquait, sans pouvoir pour autant poser le doigt dessus. Alors on observait, étudiait, tentait de percer les mystères de la couleur, en vain. Une peinture ne se lasse pas d'intriguer ses observateurs, ceux qui, envers et contre tout, continuent à travers les siècles de formuler des hypothèses quant à sa véritable signification. Mais ce ne sont jamais que des hypothèses, des phrases sans aucun sens ni fondement criées au vent, des réponses à des interrogations qui n'en avaient, au final, peut-être pas. Ou qui n'en avaient pas besoin, tout au plus. Emily était une peinture à laquelle il manquait un élément, créée par la Kara-Xanthe et fignolée par leur Reine toute puissante: Comme toute création de ce monde bicolore, elle n'était pas complète, il lui manquait quelque chose, quelque chose n'allait pas. Elle avait le cerveau grippé, qui s'était arrêté, à un certain endroit, et qui faisait qu'elle ne pouvait plus ressentir telle ou elle chose. A vrai dire, elle avait même oublié ce que cela pouvait bien faire que de ressentir la joie, par exemple. Être heureuse, elle en connaissait la définition, mais la sensation? Quand on était heureux, on souriait, c'était à peu près tout ce qu'elle en savait. Cela signifiait-il que si elle tirait ses lèvres en un de ces fameux sourires, elle serait heureuse? Emily en doutait, sans trop savoir pourquoi, ce raisonnement lui semblait tordu et illogique, comme s'il lui manquait une pièce pour trouver tout son sens. La Démone aux yeux cinabres aurait bien voulu comprendre, mais pour cela, il lui fallait cette pièce qu'elle n'était pas en mesure de saisir. Où se trouvait-elle? Elle l'ignorait, et c'était aussi simple que ça. Sans la pièce manquante, elle ne pouvait terminer ce puzzle qui s'était éparpillé suite à un énorme coup de vent. Incomplète elle était, incomplète elle resterait, si c'était ainsi que sa Reine voulait qu'elle passe le reste de son existence. Emily n'avait pas régressée, tout en ce monde évoluait, passait à un stade supérieur, à condition d'en avoir bien évidemment la force. Les êtres complets et terriblement ennuyants qui avaient par le passé constitué le peuple de Sal'ahë n'étaient plus, et avaient été remplacés par des hommes et des femmes aux figures mangées par l'absence et le vide, des œuvres incomplètes, imprévisibles, dangereuses. Mieux. Personne ne s'étonne d'un tableau s'il est d'une plate banalité, alors qu'au contraire, s'il sort de la norme, les autres ouvrent un œil rond à sa vue, partagé entre l'envie de crier au scandale et celle de crier eu génie. Ce qui est nouveau est forcément du 'génie', n'est-ce pas? Sa Reine était un être suprême, un être d'un nouveau genre, qui régnait sur une terre qui portait en son sein de nouvelles et terrifiantes créatures. Si la Kara-Xanthe avait été taillée par quelqu'un, alors ce quelqu'un était un génie. Il ne condamnait pas le monde à sa perte, oh que non: Il lui donnait la chance de se créer une seconde humanité, qui serait, elle, débarrassée des défauts de la première. Parfaite.

Quand la sensation de la douleur nous est à présent inconnu, on ne peut plus souffrir. Ou en tous les cas, l'on ne peut plus savoir que l'on souffre, et ça revient scrupuleusement au même. Emily avait senti un picotement en se coupant à l'aide de ce coquillage, picotement qui s'était amplifié lorsqu'elle avait plongé sa main dans l'eau salée qui léchait le sable dans un régulier va et vient. Sa peau s'était ouverte en deux pour laisser passer le sang, qui avait coulé, pourpre, dans le sable qui l'avait avidement aspiré. Le sable, c'était aussi pitoyable que la mer, pensa Emily avec un mauvais rictus. Il souffrait depuis au moins aussi longtemps que cette dernière, gémissant à peine pour montrer sa douleur, se contentant de se laisser porter à chaque vague un peu plus loin ou un peu plus près de la rive. Il voyageait au gré des caprices de la mer sa maîtresse, se laissait dominer, en lâche qu'il était. Et en plus, il ne savait pas même faire la différence entre l'eau salée qu'il avalait chaque jour et le sang qui venait parfois se mêler à ses microscopiques cristaux. La preuve: Il avait avalé le sien comme s'il s'était agit d'un élixir bienfaisant. Comme s'il était agit de l'eau la plus banale qu'on puisse trouver en cette terre. Mais son sang était un poison, Emily le savait fort bien; Celui qui l'avalait serait damné, n'est-ce pas? On disait souvent qu'il n'était jamais bon pour la terre d'avaler de trop grandes quantités de sang, versé par des hommes qui ne savaient rien faire d'autre que se quereller inutilement. Et pourtant, c'est toujours sur les lieux des massacres que l'herbe pousse mieux qu'ailleurs. La terre avait besoin de sang, elle le réclamait à corps et à cris, elle voulait sa part de souffrance, car rien ne s'acquiert uniquement dans l'agréable.

Ça, Sal'ahë l'avait compris, contrairement à ses voisins, qui continuaient vainement d'espérer une paix qui n'existait que dans les chimères d'écrivains torturés. Eux ne passeraient jamais au stade supérieur, resteraient ridiculement petits et inutiles, et seraient finalement écrasé par la grandeur de leur ainé du Sud. Les yeux qui s'écarquillent sous le coup de la peur, les mains qui s'élancent en avant comme pour se protéger, le cri qui s'échappe de la gorge qu'on s'apprête à trancher pour en faire jaillir le sang...C'était le malheur qu'il fallait à un pays pour grandir. On arrosait d'eau, mais on oubliait qu'il fallait aussi arroser les terres Saintes de sang: C'est dans la peine des martyrs que la vie prend enfin un sens véritable, un sens mérité, un sens neuf. Oui, dans les larmes et le sang, et pas autrement. Bien naïfs et stupides que ces personnes qui pensaient que le monde pouvait trouver son équilibre dans des mensonges camouflés en jolis discoures. Emily leur aurait rit au nez, si elle l'avait pu.

« Je sais chercher. Je sais obéir. Mais tout ça, c’est pareil qu’avancer. Avancer, c’est simplement faire ce qu’on doit faire. Je dois chercher, et je dois obéir. Donc je ne sais pas faire autre chose qu’avancer. Je ne pense pas. »

En effet, songea la petite Démone aux trop longs cheveux et aux yeux fous, obéir et chercher, c'était pareil qu'avancer. Avancer, avancer. Azure aussi ne pouvait qu'avancer, c'était logique, sans qu'elle sache pour autant si c'était normal. Déjà, si c'était logique, ça lui suffisait, elle n'avait besoin de rien d'autre. Pourquoi baissait-il la tête? Il ne pouvait qu'avancer, et c'était comme ça. C'était très bien même, ça, avancer. Ce verbe avait une jolie connotation, et plaisait bien à la demoiselle Verrona. Avancer, avancer. Avancer pour survivre, avancer vers la mort, n'était-il pas un peu paradoxal, ce verbe en question? Elle ne pensait pas. S'il avait fallu le traiter comme paradoxal, il aurait fallu traiter dans le même temps un million d'autres choses comme étant paradoxales. Ça aurait été trop fastidieux, et surtout inutile, on ne pouvait jamais s'assurer du bien fondé de ses dires ou de ses réflexions. Comment faire si on se trompait sur ne serait-ce qu'un seul petit point? Tout le reste en était faussé. Ah ah...Décidément. Avancer était bien la seule chose qu'ils pouvaient faire, tous. C'était ce qui causait le moins de soucis, au final, non?

« J’avancerais alors. Je continuerais d’avancer, jusqu'à trouver. Je veux avancer. Avec toi ? »

Avec elle? Emily fixa Azure sans sourciller, aucune émotion particulière ne passant sur son pâle visage. Elle voulait bien, mais il faillait qu'ils avancent côte à côte sans se toucher, alors. S'il la tenait et qu'elle tombait, il tomberait aussi. C'était naturel, on y pouvait rien. Un sale tour de la gravité qui nous rappelait à elle, il paraissait. S'ils ne se touchaient pas, elle pouvait tomber, ça ne le déstabiliserait pas. Et si lui tombait par hasard avant elle, ça ne la déstabiliserait pas non plus. Ensemble, oui, mais pas attachés. Juste côte à côte, sans attaches. C'était toujours mieux, on finissait par se blesser l'un et l'autre, sinon. Elle le savait. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle le savait. Sûrement encore cette logique qui revenait. Cette logique qui, pour une fois, ne lui semblait pas si tordue que ça.

« Tu saigne. Tu veux que je te soigne ? »

La démone aux cheveux foncés, comme par réflexe, redressa sa main afin de pouvoir contempler la blessure qui gonflait, irritée par le sable dans lequel elle l'avait volontairement plongée. La soigner. Le pouvait-il? Pourquoi le ferait-il? Elle n'en mourrait pas, du moins, si elle traitait la blessure et ne la laissait pas s'infecter. Pensive, Emily fixa sa main un moment, avant de relever ses deux yeux couleur de sang vers Azure. Le monde...Était emplit de questions qui ne trouvaient jamais de réponses. C'était triste, bien, mal, elle ne savait pas? Elle ne savait pas. Encore une fois. Ce que ça pouvait l'agacer, de ne pas savoir.

« Tu crois que c'est bien de soigner quelque chose de volontaire? Peut-être que je devrais payer pour avoir versé du sang. Mon propre sang. Peut-être que je mérite une punition. Non? »

Pas vraiment une réponse. Emily ne se lassait pas de se poser des questions, et ce même si ça l'énervait de ne pas leur trouver de réponses. Elle était comme ça, la Démone-Antarr aux trop longs cheveux: Elle posait, elle demandait, mais ne recevait jamais rien de satisfaisant en retour. Mais, pensait-elle avec raison, elle n'était pas la seule dans ce cas: Le monde entier se complaisait dans l'ignorance. Le monde entier, oui. Le monde entier.

[Lalala...On fait semblant de pas voir que j'ai trois mois de retard!^^'''']

Invité

Azure avait toujours eu le sentiment de ne pas être un total. De ne pas être un être complet. De ne pas être quelqu’un qui était tout ce qu’il devait être. Il lui manquait quelque chose. Quelque chose de capital qu’il n’avait jamais trouvé en dix huit années d’existence, pourtant remplies. Azure avait fait beaucoup de choses au cours de sa jeune vie. Tuer des centaines, des milliers voire plus encore, de personnes. Parfois innocentes, parfois moins innocentes, mais jamais aussi meurtrières que lui. Azure le savait bien, qu’il n’était pas innocent. Tant que l’on a tué quelqu’un de toutes manières, on n’est pas innocent, pas du tout pour certains. Mais cela n’était-il pas qu’un simple point de vue ? Les points de vue étaient légion dans ce monde déchiré en quatre. Dans ce pays qui se disputait une guerre pour un cristal qui était en leur possession, à eux, Sal’ahë. Le cristal, c’était eux qui l’avaient. Personne d’autre. Et ils s’en servaient, avec vraiment beaucoup d’importance. Pour le royaume de la reine Hider, la Kara-Xanthe était un don du ciel. Quelque chose qui avait fait d’eux des êtres supérieurs en tout points à tout ce qui existait en dehors de leurs terres. Et les démons étaient donc devenus les êtres les plus puissants du monde. Ils l’étaient déjà, avant de voir leur puissance encore plus décuplée grâce au cristal. Maintenant Azure était un membre de la race la plus pure et la plus forte de tout Lysandre. Voire sûrement au delà. Azure ignorait totalement ce qui se trouvait au delà des limites du pays. Ce n’était pas ce qu’on lui demandait, de savoir quels étaient les pays en dehors de Lysandre. Il ne savait pas. S’en fichait. C’était à la Reine de décider si ces pays étaient importants ou non. A la reine de décider si Azure devait aller les tuer, ou continuer à les épargner. Car c’était bien là tout ce qu’il pouvait faire, tuer pour la Reine. Obéir aux ordres qu’elle donnait. Tout ne monde ne peut qu’avancer, c’était à la fois vrai et à la fois faux, trouvait Azure. Lui ne pouvait qu’avancer, suivre son destin d’obéissance absolue. Comme chacun. Comme les êtres faibles en dehors de Sal’ahë. Et dedans, car même dans leur pays, il y’avait des faibles. Il ne pouvait qu’avancer, c’est tout. Rien d’autre. Lui ne pouvait faire que ça, Emily ne pouvait faire que ça aussi sans doute. Tout le monde ne pouvait faire qu’avancer. C’était vrai et faux, pourquoi ? Parce qu’il était une personne qui pouvait faire ce qu’elle voulait. Cette personne était Melfia Hider. Elle avançait, si elle le souhaitait. Mais pouvait aussi bien reculer ou s’arrêter si elle le voulait. Melfia était suprême, la divinité présente sur la terre. Elle faisait tout ce qu’elle voulait, sans aucune contrainte, parce qu’elle était la plus forte, il n’y avait pas à discuter cela. Melfia Hider ne pouvait pas faire que avancer. Elle pouvait tout faire, absolument tout. En cela, tout le monde ne pouvait pas que avancer ? Tout le monde ne pouvait que avancer, à l’exception d’une seule et unique personne ? Non. Parce que Melfia Hider n’était pas ‘tout le monde’. Elle était au dessus de ça. Au dessus du simple statut de ‘personne faisant parti d’un tout’. Elle était un tout à elle toute seule. Dans la vie, il y’avait deux sortes de personnes. Melfia Hider et tous les autres. C’était une façon de voir les choses très primitive et pas du tout recherchée, mais Azure n’avait pas besoin d’être recherché ou non-primitif. On ne lui demandait pas ça. Il n’avait pas besoin de recherche pour avancer. Tout ce dont il avait besoin, c’était de la puissance, de la puissance et encore de la puissance. C’était ce qu’il croyait. Et il avait raison dans un sens d’ailleurs, du moins l’estimait-il. Dans la vie, dans leur vie, on ne peux rien faire sans la puissance. Les faibles se font manger par les forts, c’était la nature même qui le voulait. Plus encore, c’était Melfia Hider qui le voulait. Voilà pourquoi il fallait être fort, pour ne pas se faire manger. Bien sûr, quoi que l’on fasse il y’en aurait toujours un pour manger l’autre. Mais il y’avait les faibles d’un coté, et les forts de l’autre. Et Azure ne voulait pas être faible, parce qu’être faible signifie entièrement dépendre des forts. Même les forts dépendaient de plus forts qu’eux, et Azure ne voulait dépendre de personne, excepté la reine. C’était pour ça que Second de la reine était le poste qu’il voulait, à tout prix. Peu importait ce qu’il devrait faire, il obtiendrait ce poste avec tout ce qu’il pouvait faire. Devenir fort pour être capable de décider sur les autres. De manger les faibles. C’était là tout ce à quoi il pouvait aspirer dans une vie. Devenir fort, parce que la force était tout ce dont un homme avait besoin, sans force on n’était rien. Sans le pouvoir, on ne pouvait rien faire qu’attendre simplement sa propre destruction. Alors que si on avait le pouvoir, on pouvait décider des destructions des autres. On pouvait en faire ce que bon nous semblait, on pouvait être le prédateur. Et Azure voulait être le prédateur. Parce qu’être fort, c’était un but. Un objectif. Il l’était. Il le resterait.

Emily était forte elle aussi, c’était une obligation. Elle était Démone, et elle était comme lui, une Antarr. Elle était donc forcément forte. Il n’était pas concevable qu’une Démone Antarr soit faible. Parce que les démons étaient les plus forts, et que les Antarrs étaient le stade supérieur de l’évolution. Par conséquent, un Démon Antarr était forcément la créature la plus puissante qui existait sur terre. Hormis Melfia Hider, bien évidemment. Elle n’était pas Humaine Antarr, elle. Elle était Melfia Hider. Aucun autre qualificatif n’était assez bien pour la désigner de toutes manières. Mais en parlant d’une race, d’une catégorie de gens en série, les Démons-Antarrs étaient forcément les plus puissants. Leur longévité, leur force physique, la capacité d’user de la magie, leur cruauté, leur capacité à résister aux températures froides… Tout cela était bien évidemment le signe que les Démons étaient la race la plus évoluée de tout Lysandre. Et maintenant que le Cristal Béni de la Kara-Xanthe était tombé sur eux, ils étaient devenus les êtres les plus évolués, même par rapport aux autres démons. Eux étaient toujours sans cette force phénoménale dans leur sang. Ils ressentaient encore les sentiments et les émotions, ces choses inutiles qui généraient tout ce qui était négatif pour les personnes. Sans cœur, on n’avait plus rien de tout ces poids sans intérêt. La destruction est pour toujours une fatalité. Tant que les gens auront un cœur, ce dernier générera de la haine. Ceux qui possèdent la source de toutes les émotions, l’humanité qui n’avait de cesse de se battre pour des prétextes quelconques… La guerre, toujours la guerre. Tout ça n’était que futilité. Ceux qui possèdent un cœur, c’était eux les anomalies de ce monde. Les erreurs qu’il faut supprimer. Il faut aller de l’avant, et accepter le changement. Et le changement, l’évolution, le progrès, c’était la Kara Xanthe.

« Tu crois que c'est bien de soigner quelque chose de volontaire? Peut-être que je devrais payer pour avoir versé du sang. Mon propre sang. Peut-être que je mérite une punition. Non? »

Azure regarda Emily. Elle était belle. Très belle. Un démon à la peau pâle avec des ailes noires qui lui tombaient dans le dos. Un petit démon, frêle en apparence mais terriblement malsain à l’intérieur. C’était ce que représentait Emily. La beauté sanglante d’une jeune fille capable de tout faire pour simplement voir du sang couler. Le sourire d’une jeune fille qui pensait principalement à la mort et au sang. La logique malsaine de vouloir tout tuer, de vouloir l’apogée de sa propre race. De voir tout peint de rouge, la même couleur que ses yeux. Par intérêt personnel, ou simplement parce qu’elle en avait envie. La main de la jeune fille tranchait avec tout le reste. C’était une blessure. Une belle blessure qui devait faire mal à n’importe qui pourvut d’un cœur. Une blessure infectée, Azure l’aurait trouvée magnifique sur un cadavre. Mais pas sur elle. Sur elle, ça faisait simplement laid. Elle, qui était si forte et si belle, ne devrait pas avoir ce genre de blessures, cela est réservé aux morts, aux faibles qui se font dévorer par les forts. C’était comme si lui se faisait couper un bras. Il était fort, il n’avait pas à se retrouver blessé. C’était une preuve de faiblesse. Les forts doivent rester parfaits, les faibles existent pour repaître les forts. Et Emily était une forte, elle ne devait pas être blessée de la sorte.

« C’est du gâchis, finit par dire le second d’Hider en s’approchant d’Emily, la regardant debout alors qu’elle était encore accroupie. Tu es forte. Tu ne devrais pas être blessée. Ton sang ne devrait pas couler en vain. Et je n’aime pas te voir blessée. Je n’aime pas ça. »

Il se pencha vers elle, la toisant de près avec ses deux yeux totalement vide d’expression. Elle avait des yeux vraiment magnifiques. Mais pour l’instant, il s’en fichait. Tout ce qui importait, c’était de savoir si elle devait payer. Payer pour avoir infligé de la souffrance ? Pour avoir versé son propre sang. Azure la regarda. Il ne savait pas si il devait faire quelque chose de spécial, autre que rester là, avec son visage proche de celui de la jeune fille. Ce qu’il savait en revanche, c’était qu’il devait lui répondre.

« Pourquoi devrait-on être puni pour avoir versé du sang ? Le sang des faibles est fait pour être versé. Il ne servent qu’à cela, tapisser le sol de leur sang. C’est tout. Verser toi-même ton propre sang est du gâchis. Tu mêle du sang pur à du sang impur qui parsème le sol. Punis-toi si tu le juge nécessaire. Mais fais le pour avoir gâché ton sang. Pas pour en avoir versé. »

Il plaça sa main sur le sol, récupéra un peu du sable qui portait encore une tâche sombre du sang du crabe que la démone avait écrasé tout à l’heure. Il le regarda un court instant, avant de rediriger son regard bleu vers Emily.

« Verser le sang est naturel. Tuer, c’est naturel. Je fais ça tout le temps. Nous n’avons pas à nous punir pour être plus forts que ceux que l’on tue. C’est nous qui les punissons parce qu'ils sont trop faibles. »

« C’est du gâchis. Tu es forte. Tu ne devrais pas être blessée. Ton sang ne devrait pas couler en vain. Et je n’aime pas te voir blessée. Je n’aime pas ça. »

Forte? Songea Emily, soutenant sans efforts apparent le regard vide qu'Azure posait sur elle. Ça dépendait du point de vue qu'il prenait. Elle était plus forte que toutes ces créatures pitoyables qui rampaient au sol, c'était un fait; Les oiseaux étouffaient sous la pression de ses doigts, et les crapauds mourraient sans s'en rendre compte sous le talon de ses bottes. Elle était plus forte que ces êtres dénués de toute intelligence. Mais à plus grande échelle? Cette constatation rendit pensive la jeune Antarr, qui posa de nouveau son regard rouge sur l'eau qui continuait son éternel va et vient sur la plage. Elle n'était pas la plus forte des serviteurs de sa Reine. Certains auraient pu la tuer d'un claquement de doigts, et donner son corps au charognard. Azure était de ceux-là. Emily Verrona n'était qu'un pion, un simple pion sur ce jeu d'échec nommé Sal'ahë. Si elle vivait, alors oui, elle était utile; mais si elle mourrait, est-ce que ça ferait une différence? Si sa Reine lui demandait de la servir, alors elle resterait en vie. Si elle lui demandait de se donner la mort, elle s'égorgerait sur le champ. Elle ne pouvait pas mourir sans son accord. Mais est-ce que ce serait du gâchis pour autant, si elle mourrait tout de même?

Encore une fois, Emily ne savait pas répondre à cette question, bien qu'elle pensa plutôt que ça n'en était pas. Elle n'était qu'un pion, après tout, pas une pièce plus importante, et ça ne la dérangeait pas, car elle se tenait exactement là où elle le devait. Si elle avait été différente, alors elle ne se serait pas tenue là, mais ça n'était pas le cas.

La démone aux longs cheveux n'avait pas besoin d'être différente, tant qu'elle pouvait servir son pays. Tant qu'elle pouvait marcher, respirer et défendre ce Royaume naissant.

« Pourquoi devrait-on être puni pour avoir versé du sang ? Le sang des faibles est fait pour être versé. Il ne servent qu’à cela, tapisser le sol de leur sang. C’est tout. Verser toi-même ton propre sang est du gâchis. Tu mêle du sang pur à du sang impur qui parsème le sol. Punis-toi si tu le juge nécessaire. Mais fais le pour avoir gâché ton sang. Pas pour en avoir versé. »

Emily posa de nouveau son regard sur Azure, et vit dans le vide des yeux de ce dernier son propre reflet. Un reflet mort ou incomplet, qu'elle n'aimait pas contempler trop longtemps, de peur de sentir cette colère brûlante envahir sa poitrine. Ça ne lui faisait pas mal, mais ça la gênait. C'était tellement fort, et tellement incontrôlable! Elle la ressentait souvent, sans raison apparente. Ou si raison il y avait à cela, elle ne la trouvait pas, et ça l'agaçait encore plus. Quand elle tuait, cette colère était à son paroxysme, l'empêchant de respirer comme elle le voulait, l'aveuglant, levant sur le paysage un voile rouge qui l'empêchait de tout voir et de penser. Puis quand le couteau maculé de sang tombait, elle voyait et pensait à nouveau. La colère, la colère...Pourquoi n'avait-elle pas oublié ce concept, ou plutôt, ce sentiment? Pourquoi lui seul restait-il là, tapi en elle, surgissant au gré de ses envies de bête sauvage?

Parfois, Emily se souvenait de ce jour où elle s'était réveillée, différente. Et quand elle y pensait, elle ne ressentait que cette colère sourde et aveuglante, le sang battant la mesure dans ses tempes. Elle voulait tuer, elle voulait faire payer. A qui, à quoi? Elle n'était plus sûre qu'elle cherchait à se venger. Pourquoi cette colère? Pourquoi ce vide? Si elle se rappelait de la douleur, alors peut-être comprendrait-elle...Mais même ça, elle ne pouvait pas l'avoir.

« Verser le sang est naturel. Tuer, c’est naturel. Je fais ça tout le temps. Nous n’avons pas à nous punir pour être plus forts que ceux que l’on tue. C’est nous qui les punissons parce qu'ils sont trop faibles. »

Oui. Oui. C'était ainsi que ça devait se passer, et pas autrement! Les faibles succombaient sous le coup des plus forts, c'était le cycle qui rythmait cette ère nouvelle. C'était naturel, alors...Pourquoi Emily sentait-elle que quelque chose n'allait pas dans ces paroles? Pourquoi quelque chose clochait, qu'est-ce qui n'était pas vrai dans ce raisonnement si logique à ses yeux? La petite Antarr revit sa mère, lui donner une gifle en disant qu'il ne fallait pas faire de mal aux animaux. Elle revit son père, qui avec un sourire embarrassé, s'excusait de son attitude devant d'autres parents. Mauvaise fille, ce n'est pas bien, ne frappe pas tes camarades, ne fait pas de mal aux animaux, soit gentille. Tuer, c'est mal. Ils lui disaient tous ça, avant. Avant que tout ça n'arrive, avant que tout ne change. C'était du passé, des feuilles froissées dont il fallait se débarrasser.

De l'encre avait coulé depuis, et du sang, aussi. Tuer, c'était peut-être mal avant, mais maintenant, elle se demandait...

« Si je perdais la vie, ce ne serait pas du gâchis. Je ne suis pas la plus forte. Je suis remplaçable. Donc ce ne serait pas du gâchis. (Elle s'arrêta de parler pour regarder sa main, avant de reprendre) Seule notre Reine saurait si je dois être punie ou non. »

Le regard fixe, Emily regarda un moment la mer grise qui gémissait devant elle. Puis elle tourna brutalement sa tête vers Azure. Elle la pencha sur le côté, comme intriguée. Mais sa voix n'avait aucune intonation curieuse, juste ce ton plat teinté de cette éternelle colère qu'elle ressentait:

« Tes yeux sont bleus. Pour un Démon, c'est très bizarre. »

Elle replongea sa main dans l'eau salée, avec un sourire inquiétant.

« Oui, très bizarre. »

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Qu’Emily Verrona soit morte donnait à Azure Kite un véritable sentiment de mal être. Ce n’était pas comme si il la regretterait à mort non plus. La chose était plus compliquée que ça. Il n’aimait pas vraiment Emily, mais ne voulait pas qu’elle meure, qu’elle ne soit plus là. Parce qu’à ses yeux à lui, elle avait une certaine importance. Parce qu’elle était forte ? Peut être… Parce qu’ils s’étaient embrassés ? Peut être. Parce qu’ils étaient tout deux de la même race et que donc il ne tolérerait pas qu’un démon puisse être ‘remplaçable’ ? Non, pas vraiment. Parce que dans un sens, tout le monde était totalement remplaçable. La question n’était pas vraiment là de toutes façons, du moins pas encore. Le second d’Hider préférait pour l’heure se concentrer sur le cadavre du crabe mort un peu plus loin. Il reporta son attention sur sa main, qui contenait encore un peu du sable ensanglanté par le même crustacé un peu plus tôt. Le sang sur ce sable, c’était la bonne couleur. Du rouge sang qui allait envahir le monde, telle était la vision d’Azure d’un monde parfait. Pour lui, tuer et massacrer n’avait rien de mal. Même si il se souvenait vaguement qu’auparavant on avait dût lui dire qu’il ne fallait pas être tout le temps violent, au final Azure n’avait eu que faire de ces avertissements. Il s’était éveillé un jour en même temps que les autres, et depuis plus personne n’avait quoi que ce soit à faire qu’il massacre des gens. Au contraire, on le remerciait parfois et on le payait pour ça aussi. Le fait d’exercer son métier actuel était une bonne chose à ses yeux. Il pouvait tuer, laisser libre cours à son envie de boucherie, uniquement parce que certaines personnes n’avaient plus besoin d’être en vie. Uniquement parce que certaines personnes ne méritaient pas de vivre selon la volonté de la reine. A part tuer, il ne faisait pas grand-chose. Et il fallait avouer qu’il ne passait pas tout son temps à cela non plus, sinon la population de Sal’ahë et de Lysandre serait déjà sérieusement entamée. Mais c’était sa principale activité. Tuer des gens. Simple et efficacement. Massacrer des personnes, ce qui était la base et la fondation du fait de manier une arme. Azure ne voyait aucun autre intérêt à manier une arme que de tuer son prochain. Les armes sont des instruments de mort. Il faut s’en servir pour tuer. C’est tout.

« Si je perdais la vie, ce ne serait pas du gâchis. Je ne suis pas la plus forte. Je suis remplaçable. Donc ce ne serait pas du gâchis. Seule notre Reine saurait si je dois être punie ou non. »

La voix d’Emily s’éleva de nouveau, attirant ainsi l’attention du second aux yeux bleus sur elle. Il la regarda faire, la regarda parler et la vit regarder sa main. Il la contempla ainsi jusqu’à la fin de sa phrase, pour ensuite baisser doucement la tête. Oui, seule la Reine saurait si elle devait être punie ou pas, bien sur. Mais la Reine, c’était la divinité de son peuple. C’était le jugement divin, le jugement final. C’était elle qui décidait de tout dans ce pays. Azure n’avait pas parlé au nom de la reine à l’instant. Il n’avait pas parlé au nom de la reine, mais avait plutôt dévoilé son propre ressenti sur la chose. Ressenti ? Ce mot fit froncer les sourcils d’Azure un peu plus qu’ils ne l’étaient déjà. Ressenti… Comme si il était capable de ressentir vraiment quelque chose… C’était contradictoire. Ses paroles plus tôt étaient nées d’autre chose qu’un sentiment. Peut être qu’elles étaient nées du fait qu’il tienne à Emily d’une certaine manière ? Peut être. Ca l’énervait de ne pas être sur. De ne pas comprendre pourquoi il agissait ainsi. Il ne tiqua pas à la tirade d’Emily. Il se contenta de penser que même si ça ne serait pas du gâchis pour le pays, du moins pas véritablement, pour lui ça en serait. Azure ne voulait pas perdre Emily. Se creuser la tête pour savoir pourquoi lui paraissait inutile. Perdre Emily aurait été comme perdre une de ses deux tri-lames. Il aurait put la remplacer. Mais n’en avait pas envie.

« Tes yeux sont bleus. Pour un Démon, c'est très bizarre. »

Elle avait dit ça en se tournant brusquement vers lui, ce sourire particulier sur son visage. Ce sourire qui n’inspirait à Azure que du mystère. Ca ne lui faisait pas peur. Mais ça n’était pas pour autant un sourire forçant l’admiration et le respect. Non, c’était autre chose. Mais il ne pouvait pas dire qu’il trouvait ce sourire désagréable pour autant non plus… Compliqué, encore une fois. C’était pour toutes ces complications qu’il avait tenu à revoir Emily. Pour y trouver une réponse, mais il semblait qu’elle était aussi perdue que lui. Avaient-ils vraiment besoin de réponses ? Est-ce que tout cela était vraiment nécessaire ? Ne pouvait-il pas tout simplement…. Rester avec elle parce qu’il trouvait ça assez…. Assez quoi d’ailleurs ? Une sensation de contentement. Un peu comme quand il tuait quelqu’un et qu’il était soulagé d’avoir ôté au monde un poids supplémentaire…

« Oui, très bizarre. »

Elle semblait en colère alors qu’elle replongeait sa main dans cette eau salée. Pourquoi est ce qu’elle faisait ça, encore ? Il n’aimait pas qu’elle se fasse mal ou qu’elle s’enlaidisse la main. A ses yeux, Emily était agréable à regarder. Quelque chose de beau ne doit pas être enlaidi de la propre opinion d’Azure. Jamais il ne lui serait venu à l’idée de colorier le sang en bleu. Jamais il ne lui serait venu à l’idée de replacer ses lames de manière droite. Jamais il ne lui serait venu à l’idée de faire une cicatrice à son père. Les belles choses doivent êtres préservées.

« Je sais. Répondit-il avec un ton presque désolé. J’aurais préféré avoir les mêmes yeux que toi. Ils sont plus beaux. »

Ils sont la couleur du sang. La couleur de la mort et des armes. Mais surtout, un œil de la Reine suprême était lui aussi de la couleur rouge. Rien que pour cela, le monde méritait d’être au moins à moitié repeint en rouge. Et l’autre moitié en argenté. Azure lui, voyait la chose un peu différemment. Il utiliserait l’argent pour repeindre la chose en rouge. L’acier pour couvrir le monde de sang.

« Et si j’arrachais les yeux rouges de quelqu'un pour me les mettre ? Peut être que ça serait moins bizarre. Qu’en penses-tu ? »

Emily trouvait que la mer aurait gagné à quitter cette couleur grise pour en arborer une rouge sang. Elle aurait été bien plus belle à contempler, et aurait semblé moins triste. Gris, c'était la couleur de tout ce qui était mort, tout ce qui n'était plus. C'était la couleur de la déchéance. Du passé, auquel il ne fallait jamais s'accrocher sous peine de ne plus pouvoir suivre le rythme du présent, qui nous entraînait inexorablement vers une fin plus proche qu'on ne le pensait. Qu'est-ce que ça faisait, de mourir? Qu'est-ce qu'on ressentait, quand on se vidait de son sang? Quelles images défilaient devant nos yeux une fois notre dernière heure arrivée? L'esprit d'Emily était remplit de questions qu'elle ne posait jamais et qui s'amassaient avec le temps en un tas indescriptibles de paroles et d'interrogations. Pourquoi, pourquoi, pourquoi...Si ce mot n'avait jamais existé, songea la démone, alors jamais elle n'aurait eut à se poser toutes ces questions. Ça lui secouait l'esprit, la perturbait avant que ça ne la fâche pour de bon. Le monde était mieux en rouge plutôt qu'en gris, mais elle ne pouvait pas le repeindre comme ça lui chantait. Il ne l'aurait pas laissée faire, car ce n'était pas à elle que revenait cette tache. Elle avait beau faire couler le sang écarlate, la terre l'absorbait, et il n'en restait plus aucune trace. Et ça, ça la frustrait comme rien d'autre ne pouvait plus la frustrer. Elle ne pouvait rien faire, rien changer. Impuissante. Et si en général elle se complaisait dans ce rôle, parfois, ça la mettait hors d'elle. Elle voulait prouver quelque chose, mais n'y arrivait pas. Comment faire pour prouver? Que voulait-elle prouver? Emily n'en savait trop rien...

« Je sais. J’aurais préféré avoir les mêmes yeux que toi. Ils sont plus beaux. »

Ses yeux à elle étaient rouges, pensa Emily en fixant pensivement la blessure qui gonflait sur le dos de sa main. Ils étaient rouges comme ceux de presque tous les Démons de ce monde. Pourquoi les Démons avaient-ils les yeux rouges, les cheveux foncés et la peau pâle? Personne ne savait. Mais c'était un fait avéré. Un Démon aux yeux bleus et aux cheveux blonds, ça n'existait pas. Ou alors, ce n'était pas un vrai Démon. C'était une grosse erreur, une erreur bien laide à laquelle il aurait fallu enlever les yeux et les cheveux. Emily avait les yeux rouges. Son frère aussi avait les yeux rouges. Ils avaient les yeux de leur mère. Son père avait les yeux noirs, l'autre couleur que l'on trouvait beaucoup chez les Démons. Ils étaient tous comme il fallait, des vrais Démons, des Démons fiers. Ses cousines, elle s'en fichait. Elles n'étaient que des quart de Démones, de vraies bâtardes qu'elle n'avait jamais pu supporter. Elles pouvaient toutes crever, ça ne lui aurait strictement rien fait, même pas le moindre petit picotement au cœur. Azure avait des yeux et des cheveux bleus, lui. Elle trouvait ça bizarre, tout sauf naturel. Laid. Mais sur lui, ça ne faisait pas si laid que ça, alors ça allait.

Mais elle n'aimait pas ça quand même. Elle trouvait ça vraiment...Déplacé, en quelque sorte. Mais il n'y pouvait rien. A qui la faute, en ce cas? Qui fallait-il blâmer? Même si Azure le désirait très fort, jamais il ne pourrait avoir les mêmes yeux qu'elle. Pauvre, pauvre de lui.

« Et si j’arrachais les yeux rouges de quelqu'un pour me les mettre ? Peut être que ça serait moins bizarre. Qu’en penses-tu ? »

Emily fronça largement les sourcils à ces paroles. Non, il ne pouvait rien y faire. On ne pouvait pas prendre les yeux de quelqu'un et nous les mettre, c'était impossible. Impossible. Sinon, on verrait les choses comme les voyait la personne à qui avait appartenu ces yeux, et on ne serait plus entièrement nous, mais elle aussi. La jeune fille aux longs cheveux détestait penser qu'elle pourrait ne plus s'appartenir entièrement, et être le jouet de quelqu'un d'autre que sa Reine. Les morts devaient rester morts, c'était pour ça qu'on les tuait: Pour qu'ils ne reviennent pas. Garder quelque chose d'eux et se le mettre, c'était les garder en vie. Se mettre leurs yeux, c'était leur permettre de continuer à voir le monde. Et ça, Emily ne pouvait pas le permettre. On ne mélangeait pas vivants et morts. Jamais.

« Non, répondit-elle en regardant Azure, tu permettrais à celui que tu as tué de continuer à vivre. Ce serait mal. Je trouverais ça mal. Tes yeux sont bleus, ils sont bleus. Tu ne peux rien y faire. Juste subir. »

Subir, comme la mer qui amenait et reprenait ses vagues à intervalles réguliers. Ce n'était pas très bien, de subir. C'était assez humiliant, quand elle y pensait, bien qu'elle n'était pas certaine que sa définition du mot 'humiliant' soit exacte. Mais ils n'avaient pas le choix. Ils étaient leurs propres victimes, coincés dans des corps qui ne leur plaisaient souvent pas. Ils subissaient. Jusqu'à ce que leur Reine ne décide qu'ils en avaient eu assez.

« J'ai mouillé le manteau. Je vais avoir des problèmes. » Fit platement Emily, toute colère ayant soudain disparue de sa voix et son regard. A présent, elle ressemblait juste à une coquille vide, sans âme. Sans vie.

Invité

Pour Azure Kite, la couleur de ses yeux était en quelque sorte l’unique insulte de sa vie. Il était un démon, un démon de sang pur et de race noble. Les yeux bleus n’étaient pas de cette race de manière très naturelle. Ils étaient aussi rares pour un démon que les yeux rouges chez un humain. Et c’était laid. Des yeux bleus sur un démon, c’était aussi laid que des yeux rouges sur un humain. Emily, elle, était une démone. Des yeux d’un magnifique rouge sang étaient présents sur son visage. Ils étaient beaux. Rouges comme le soleil qui se lève après une nuit qui a vu beaucoup de sang couler. Le rouge… C’était vraiment la couleur des dieux pour Azure. La couleur d’un œil de la déesse qui le gouvernait. Melfia Hider et son œil rouge sang, accompagné de son œil gris acier. Le fer qui fait couler le sang…. Et le rouge qui repeint le monde, comme une gigantesque toile artistique faite par un peintre dément, avide de voir la mort et le sang se répandre. Avide de voir l’écarlate recouvrir le monde entier. Avide de rouge. C’était ce genre d’artiste qu’Azure aurait souhaité être. Si il avait pu peindre, il aurait sûrement adopté cette carrière. Et le monde aurait eu la même couleur que les yeux d’Emily. Le rubis rouge qui remplaçait tout ce bleu et ce vert immonde. Il ne savait pas peindre. Il ne savait pas ce qu’était l’art véritable. Pour Azure, la seule façon d’exprimer son art et son talent, c’était au travers de ses meurtres et de ses assassinats. Au travers des tripes de ses victimes misent à l’air libre, au travers du sang coulant des plaies innombrables des malheureux qu’Azure avait dépecé dans sa vie.

« Non, tu permettrais à celui que tu as tué de continuer à vivre. Ce serait mal. Je trouverais ça mal. Tes yeux sont bleus, ils sont bleus. Tu ne peux rien y faire. Juste subir. »

Azure regarda Emily, qui le regardait en retour. Elle avait vraiment des yeux magnifiques. Il aurait voulu avoir les mêmes, vraiment. Être aussi beau qu’elle était belle. Parce qu’elle était belle. Emily Verrona faisait parti de ces personnes qui se gravaient dans la mémoire du second d’Hider. Elle était belle. Ses yeux étaient beaux. En tout cas, elle avait beau lui dire qu’il ne fallait pas qu’il se mette des yeux rouges, elle n’était pas dans le même état que lui. Elle, elle en avait de beaux yeux écarlates. Elle n’avait pas le même genre de problème que lui : le fait d’avoir une couleur d’yeux inhabituelle pour sa race. Elle avait des yeux sublimes. Elle pouvait lui dire ça, elle ne comprenait pas comment cela pouvait être douloureux d’être ainsi différent. De se faire ainsi remarquer juste à cause d’une couleur d’yeux, malgré un sang pur. Elle ne comprenait pas, mais Azure ne pouvait pas lui en vouloir. Parce qu’elle était quelqu’un de spécial. Il ne savait pas pourquoi. Pourquoi, malgré cet ordre et ce manque évident de respect, il continuait à croire en Emily Verrona. Sans doute parce qu’il avait ressenti du plaisir. Au moment où leurs lèvres s’étaient jointes, Azure avait ressenti du plaisir. Beaucoup de plaisir. Comme si il venait de révéler une partie inconnue de lui-même. Quelque chose de vraiment…. Plaisant. Être avec Emily était quelque chose qui lui plaisait, oui. Pas autant que d’obéir à Melfia Hider, ou le fait de tuer. De tuer quelqu’un d’autre. C’était plaisant, retirer la vie. C’était plaisant de l’embrasser…. Il ne savait pas pourquoi. Il trouvait ça agréable, c’est tout. Et elle était belle. Pas belle comme Melfia, ça c’était impossible. Mais elle était belle. Jolie à regarder. Et ça, c’était important.

« J'ai mouillé le manteau. Je vais avoir des problèmes. »

Le second d’Hider la regarda, alors qu’elle ne semblait plus avoir aucune émotion à l’intérieur d’elle. Elle était devenu coquille vide, vide d’émotions, vide de sentiments, vide de plaisir… Vide de tout ce qui pouvait faire un être vivant, vivant. Et c’était tant mieux. Il préférait les gens ainsi. Même Emily. Qu’elle soit belle et simplement belle… Qu’elle soit ainsi et simplement ainsi. Qu’elle ne soit pas la femme avec les émotions qu’il détestait. Qu’elle soit…. Une personne comme lui. Qui lui ressemblait mais qui pouvait lui dire ce qu’il avait à faire. Quelqu’un…. Quelqu’un qui pouvait lui donner des ordres, autre que Melfia Hider. IL obéissait à Melfia. Il lui obéissait au doigt et à l’œil. Mais il y’avait quelqu’un d’autre ? Non, c’était différent… Sa relation avec Emily était plus complexe. Elle n’était pas sa reine. Elle n’était pas une victime potentielle. Et elle n’était pas une de ses lames qui servaient à tuer plus de monde. Elle était autre chose. Quelque chose qu’il ne voulait pas blesser. Qu’il ne voulait pas salir.

« Si tu ne voulais pas de problèmes, il ne fallait pas le mouiller. C’est de ta faute. »

Il avait dit cela d’un ton neutre. Sur le même qu’elle avait elle-même employé en fait. Un ton simple, sans émotions véritables, sans rien. Ils étaient deux personnes, deux coquilles, sans âme et sans cœurs, à parler sur la plage de problèmes quotidiens. Mais d’un ton monocorde et sans vie. Ce ton de mort vivant. Azure aimait ce ton. Il aimait ce moment avec elle. Il avait envie de la regarder plus en détail. Il la fixa. Ses yeux rouges. Ils étaient magnifiques.

« Tu as peur d’avoir des problèmes ? »

C'était comme un manque qu'elle ne pouvait pas décrire. Ou bien un surplus de quelque chose, qui avait prit toute la place, ne laissant rien à ce qui devait à la base être là. C'était troublant et énervant au possible, cette impression de toujours passer à côté d'une notion essentielle, sans jamais pouvoir ne serait-ce que l'effleurer. La comprendre. Emily n'avait jamais été avare de savoir, car elle s'était toujours contentée du nécessaire, comme si le reste ne comptait pas. C'était vrai, dans un sens; Maintenant encore, elle n'enviait pas les érudits et leurs pensées tellement chargées qu'elles devaient être incompréhensibles pour une autre personne qu'eux. A quoi ça servait, penser, sinon à se torturer inutilement l'esprit ? Emily aurait sincèrement voulu ne plus penser, agir au gré de ses impulsions, encore plus qu'elle le faisait. Ne plus penser du tout, ne plus se demander si telle ou telle chose était à sa place, si elle avait collé le bon nom à telle ou telle émotion. Elle s'en fichait, mais n'arrivait pas à ne pas s'en préoccuper. Comme c'était stupide. Il devait lui manquer quelque chose, ce lien qui la reliait auparavant à cette logique tant évoquée mais si peu aperçue, au final. La démone qui s'énervait si souvent était plongée dans une sorte de léthargie, ses yeux fixant sans la voir la mer grise. Elle observait tout ceci avec un détachement qui ne lui était pas commun. En cet instant même, alors qu'autour d'elle rien n'avait changé, Emily se sentait une autre personne. Comme si, hors de son corps, elle assistait à une scène qui ne la concernait en rien. Comme si cette jeune fille aux yeux rouges et ce garçon aux yeux trop bleus lui étaient inconnus, et que leur sort l'intéressait bien peu. Pourtant, elle savait que cette fille qui ne cessait de se baisser pour atteindre les vagues était elle. Elle aurait du s'en soucier, lui dire de se secouer. 'Réagis!', cria une petite voix dans sa tête, mais elle ne cilla pas.

Le ciel aurait pu lui tomber sur la tête, ça lui aurait été égal. Il finirait bien par tomber un jour... Car leur Reine mise à part, rien n'était éternel. Rien du tout. Ni le ciel, ni les idéaux que certains imbéciles proclamaient avec ferveur. Un jour, tout cela disparaitrait, et une seule silhouette se tiendrait contre l'horizon baigné de sang. Tout cela ne concernait pas Emily. Sa fin... Ne la concernait même pas. Quelle aberration, gémit de nouveau la petite voix, à qui elle ne prêta pas la plus petite once de son attention.

« Si tu ne voulais pas de problèmes, il ne fallait pas le mouiller. C’est de ta faute. »

Si Azure n'avait pas parlé, l'Antarr aux longs cheveux sombres aurait pu rester ainsi immobile et indifférente un long moment encore. Elle cligna plusieurs fois des yeux, comme à la sortie d'un mauvais rêve. La voix de son compagnon lui paru un court instant lointaine, comme venue d'ailleurs. Puis elle s'aperçut qu'il était tout près d'elle. Sa faute ? Elle l'avait mouillée, oui... Si elle ne voulait pas avoir de problèmes, alors elle n'aurait pas du le mouiller. Elle n'aurait pas du le prendre tout court. Azure savait cela. Il savait que c'était sa faute. Emily se redressa entièrement. Elle en avait assez de se baisser et de se relever. Sa faute, sa faute... Elle se répéta le mot à voix basse, inaudible litanie.

« Tu as peur d’avoir des problèmes ? »

Peur ? Sa faute ? Peur ? Emily fronça de nouveau les sourcils, l'air mécontente et troublée. C'était sa faute, oui. Enfin elle pouvait regarder dans le miroir de son esprit le reflet qu'il lui renvoyait et dire que c'était le sien. Elle était sorti de sa contemplation extérieure, et avait de nouveau les pieds sur terre. Mais peur ? La démone s'imagina son frère, et son visage figé dans une froide expression de mépris et de haine lorsqu'il la verrait revenir avec son manteau humide. Elle ne se souvenait pas, avant ce fameux jour, qu'il l'ait jamais regardé de la sorte. Maintenant, il ne la fixait qu'ainsi, ou bien ne la fixait pas. Il la frapperait, et elle devrait s'excuser. Puis il arrêterait et laisserait leur mère la soigner. C'était toujours comme ça que ça se passait. Pour éviter d'avoir des bleus, elle aurait du cesser d'importuner son frère. C'était sa faute. Elle ne pouvait pas avoir peur, c'était sa faute ! Mais ce sentiment qui s'insinuait à travers sa colère bouillante la refroidissait. Froid comme la glace. Quel était son nom ?

Sans prévenir, Emily se tourna vers Azure, et le saisit par le devant de son vêtement. Elle le força à se baisser et la regarder. Elle plongea ses yeux rouges dans ses yeux bleus et se tu, comme à la recherche de quelque chose. Puis elle demanda, sa voix animée de nouveau par cette colère qui ne la quittait pas, mais tempérée par une hésitation presque imperceptible:

« C'est ma faute. Je sais que mon frère me frappera si je touche à ses affaires. Mais je le fais quand même. C'est ma faute. Est-ce que je peux avoir peur si c'est ma faute ? Je ne sais même pas ! »

Emily se refusait à lâcher la veste d'Azure, la tenant fort dans sa main. Il y avait quelque chose en lui qu'elle ne comprenait pas. Tous les autres étaient fabriqués sur le même modèle, mais lui avait un truc qui clochait. Un truc qui différait. Était-ce dangereux, mal ? Pour elle, qu'est-ce que ça signifiait ?

« Il y a quelque chose que je ne comprends pas. Vraiment pas. C'est toi. Je ne comprends pas... Toi. »

Emily avait du mal à se comprendre elle-même. Les autres, elle ne voulait même pas les comprendre, ils n'en valaient pas la peine. Mais Azure si, et elle n'y arrivait pas. Une nouvelle vague de colère fit briller ses yeux. Elle ne comprenait rien, même pas ce qu'elle aurait voulu comprendre !

[Oh oh oh... Bon, il est temps de passer aux choses sérieuses et aller griller les sangliers.|D]

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Maintenant qu’il y repensait, il n’était toujours pas bien certain de ce qu’était Emily à ses yeux. Après tout, n’était-il pas venu pour ça ? N’avait-il pas été poussé à se rendre sur cette plage, dans ces conditions dans le but de la revoir ? Dans le but de lui demander si elle savait quelque chose, et celui de clarifier la situation ? Azure lui avait demandé à cette petite démone aux yeux rouges. Si elle savait quelque chose. Si elle était au courant de la place qu’elle prenait à présent dans la vie du Second de la Reine de Sal’ahë. Et la réponse qu’il avait obtenue le contrariait. Non, elle ne savait pas. Pire, elle lui avait demandé exactement la même chose de son point de vue à elle. Elle lui avait demandé quelle place lui-même avait occupé dans la vie d’Emily Verrona. Dans sa vie à elle. S’il lui demandait la même chose pour lui, c’était qu’il ne le savait pas. Elle ne le savait pas. Aucun des deux ne le savait, ils étaient maintenant bloqués. Le problème maintenant, c’était de résoudre malgré tout cette énigme d’identité. Malgré le temps passé avec elle au bord de cette plage, Azure Kite commençait à douter que cela finisse par lui amener la réponse, comme par magie. Ce n’était pas qu’il n’aimait pas la magie, mais pour lui, Magie n’était qu’un synonyme d’Arme ou encore, d’Instrument à Tuer. C’était quelque chose à laquelle il avait recours pour répandre la mort et la destruction sur son passage, exactement comme ses tri-lames ou encore comme ses hommes d’armes. Il n’avait toujours pas la réponse malgré toutes ses tentatives. Ou avait-il vraiment tenté quelque chose, au final ? Il ne s’était qu’assit et avait attendu que la réponse lui apparaisse. Ou qu’elle apparaisse à Emily pour que celle-ci puisse lui dire exactement la réponse qu’il attendait. Cette réponse qu’il n’avait toujours pas, malgré cette attente. Ca commençait un peu à énerver le monstre meurtrier qui se tenait avec la villageoise à coté de l’eau à présent. Un peu seulement. Il était étonnamment calme pour une situation comme celle-ci.

Maintenant qu’ils étaient assez proches, Azure pouvait bien se rendre compte qu’Emily était fragile d’apparence. Même si elle était forte, et qu’elle pouvait sans aucun problème aller tordre le cou d’un Ours pour ensuite lui arracher sa tête et jouer avec sa colonne vertébrale, elle avait l’air si… Frêle et peu dangereuse. Chétive, elle l’était. Elle ne semblait pas très musclée, même s’il ne faut pas se fier aux apparences. Mais cette apparence trompeuse était pourtant quelque chose qui troublait Azure. Non pas vraiment parce que cela représentait une manière de dire que les apparences étaient trompeuses, et que quelque chose en apparence faible pouvait être finalement bien plus cruel et terrifiant que tout ce que l’on pouvait imaginer. Non, pas pour cela, mais plutôt pour le fait qu’Emily offrait un contraste agréable entre sa force, sa cruauté, son coté prédateur dangereux, et le fait qu’elle soit d’une apparence de jolie jeune fille. Car elle était jolie, il n’allait pas mentir. Azure savait où trouver la beauté. Il pouvait dire que telle personne était belle, ou que telle personne ne l’était pas. Emily, elle l’était. Au moins à ses yeux. Et donc, ça suffisait amplement pour définir qu’elle l’était.

Azure regarda Emily. Emily le regarda. Les yeux rouges dans les yeux bleus. Sans le prévenir et d’une manière soudaine, la jeune démone tendit brusquement sa main avant de forcer le second d’Hider à se baisser pour se retrouver à sa hauteur. Il était vrai qu’elle était bien plus petite que lui. De ce fait, pour la regarder en face à face direct, il avait besoin de se placer à une hauteur plus basse que celle où il se trouvait auparavant. Avait-elle fait ça pour cela ? Dans ce but ? Azure l’ignorait. En tout cas, maintenant, elle le voyait en face à face et le tenait fermement par le devant de sa veste.

« C'est ma faute. Je sais que mon frère me frappera si je touche à ses affaires. Mais je le fais quand même. C'est ma faute. Est-ce que je peux avoir peur si c'est ma faute ? Je ne sais même pas ! »

Elle répétait ça, refusant de le lâcher. Azure la regarda, sans bouger, la laissant l’emprisonner ainsi, sans vraiment réagir autrement que par le regard. Que voulait-elle ? C’était sa faute. Pouvait-elle avoir peur ? Il ne savait pas non plus. Il ne savait pas grand-chose au final, mais c’était surtout parce qu’il n’en avait rien à faire de savoir ce qui ne le concernait pas. Qu’Emily ait peur, était-ce important ? Elle avait salit le manteau, elle devait assumer les conséquences de cela si elle savait qu’elle les subirait si jamais elle salissait le manteau. C’était une punition normale. Dans la famille d’Azure, il était interdit de rentrer dans les chambres sans frapper. Azure avait été puni les fois où il l’avait fait en connaissance de cause. C’était normal de punir quelqu’un quand il avait fait quelque chose qu’il n’avait pas le droit de faire. Alors elle n’aurait pas du en avoir peur, puisqu’elle le savait déjà. Non ? C’était comme ça qu’Azure pensait. Elle n’aurait pas dût avoir peur puisqu’elle le savait. Lui, à sa place, n’aurait pas eu peur en tout cas.

« Il y a quelque chose que je ne comprends pas. Vraiment pas. C'est toi. Je ne comprends pas... Toi. »

Azure cligna des yeux en la regardant. Elle ne le comprenait pas, alors… Quelque chose qu’elle ne comprend pas, c’était lui. Vraiment pas. Le second de Melfia Hider cligna une seconde fois des yeux, cherchant quoi répondre. Il la regarda. Plantant ses yeux vides de la couleur de la mer calme en été dans ceux, tout aussi vides d’Emily, Azure lui répondit.

« Je ne te comprends pas non plus. Je ne sais pas pourquoi tu es toujours dans ma tête ces derniers temps. Je ne sais pas qui tu es. Ce que tu est pour moi. »

Le jeune homme laissa sa main gauche dériver jusqu’à la main dont Emily se servait pour le forcer à se baisser, et caressa la main froide qui le maintenait prisonnier. Un temps, il joua entre les phalanges et les creux du dos de la main de la jeune Verrona, puis sans aucun avertissement, il resserra brusquement sa propre main en une prise sur le poignet de sa compagne. Il serra ainsi, d’une force considérable qui aurait pu blesser Emily si Azure ne dosait pas correctement sa puissance. Il la força à retirer sa main, la décalant de quelques centimètres sur la gauche, puis reprit, maintenant sa prise afin d’empêcher Emily de le re-emprisonner.

« Et je ne me comprends pas, d’ailleurs. Je ne te fais pas de mal. J’ai tué sans problème n’importe quelle personne, qu’elle me soit indifférente ou que je ne l’apprécie pas, et toi je veux au contraire, te préserver. Je ne comprends pas plus que toi. »

[Buwh. Quand elle veut, lui il est prêt.8D]

Si elle avait été quelqu'un d'autre, ailleurs, dans un autre temps, peut-être Emily aurait-elle été certaine de ce qu'elle ressentait. Mais ce n'était pas le cas, et elle pouvait seulement se demander ce qui n'allait pas dans toute cette histoire. Quelle page avait été arrachée au livre, et quelle partie elle concernait. Ce n'était pas seulement elle, c'était bien d'autres gens, elle n'était pas un cas isolé. Pas la seule à se dire que quelque chose n'allait pas, et que derrière le miroir se trouvait une autre réalité. Cet état plaisait et ne plaisait pas à Emily: Il lui plaisait car elle semblait flotter au dessus des autres, comme détachée de toute obligation envers quelqu'un d'autre que sa Reine. Elle était forte, puissante. Plus puissante qu'elle ne l'aurait jamais été sans la Kara-Xanthe. Et il ne lui plaisait pas car il y avait toujours des exceptions à la règle comme Azure, et des questions qu'elle se posait qui restaient sans réponse. Comme si elle avait perdu la moitié de son vocabulaire, répondre à certaines interrogations lui était impossible, et c'était on ne pouvait plus frustrant. Comment dire à Azure ce qu'elle ressentait et ne comprenait pas sans les mots appropriés ? Elle pouvait ouvrir la bouche, mais aucun son n'en sortirait. Elle ne savait pas. Il y avait une sorte de mur qui l'empêchait d'accéder à certaines connaissances maintenant enfouies au plus profond d'elle-même. Emily ne voulait pas aller les chercher, elle savait qu'elle n'en avait pas besoin. Mais d'un autre côté... Ça l'embêtait de ne pas savoir ! Elle voulait savoir. Comment résoudre ce dilemme ? Tout était en total contradiction. Si elle avait seulement su quelle page avait été arrachée, elle n'aurait pas autant de mal à s'y retrouver.

Azure était la pire énigme qu'elle avait rencontrée jusque là. Pire encore que ces questions qu'elle posait et auxquelles personne ne daignait répondre. Ou était-ce car personne ne le pouvait ? Elle aurait du ne pas se préoccuper de lui, comme elle ne se préoccupait de personne, pas même de sa propre famille. C'était grotesque, non ? Emily avait peut-être changée, mais elle savait qu'elle aurait du tenir à sa famille tout particulièrement. Or, ce n'était pas le cas. Si son frère voulait partir, elle ne le retiendrait pas. A part une place de vide à table, ça ne ferait pas de différence. Pour ses parents, c'était différent, car sans sa mère il n'y avait pas à manger, et sans son père pas d'argent pour acheter la nourriture. Elle dépendait d'eux, mais c'était tout. Si Azure avait voulu s'en aller, là, l'aurait-elle retenu ? Qu'elle se pose la question était déjà énorme en soi.

« Je ne te comprends pas non plus. Je ne sais pas pourquoi tu es toujours dans ma tête ces derniers temps. Je ne sais pas qui tu es. Ce que tu est pour moi. »

Il ne savait pas non plus. Évidemment, qu'il ne savait pas, personne ne savait ! Tout n'était que questions sans réponses. Tout n'était qu'inconnu... N'y avait-il rien de clair en ce monde ? Emily fixa encore son compagnon un moment, pensive, avant qu'il ne posa sa main sur la sienne. Elle le laissa faire, même lorsqu'il resserra soudainement sa prise et la fit le lâcher. Il aurait pu lui faire mal, lui briser le poignet s'il l'avait voulu, il en avait la force. Mais tout ce qu'il avait fait, c'était la faire lâcher prise. Pourquoi ? Il aurait pu lui faire très mal, il aurait pu la tuer. Mais il ne le faisait pas. Parce qu'il l'avait dans la tête, peut-être ? Emily aussi avait Azure dans la tête. Comment ça se faisait ? Encore quelque chose qu'elle ne parvenait pas à nommer.

« Et je ne me comprends pas, d’ailleurs. Je ne te fais pas de mal. J’ai tué sans problème n’importe quelle personne, qu’elle me soit indifférente ou que je ne l’apprécie pas, et toi je veux au contraire, te préserver. Je ne comprends pas plus que toi. »

Alors ils étaient deux à ne pas comprendre, songea la Démone aux yeux grenats, presque satisfaite. Elle n'était pas seule à s'interroger sur ça précisément. Ni elle ni Azure ne savait ce qui les attirait chez l'autre, ce qui les intriguait. Qu'est-ce qui n'allait pas ? Qu'est-ce qui était différent chez Azure ? Physiquement parlant, il était comme un autre. Grand comme les hommes l'étaient, fort comme les hommes l'étaient. Alors qu'est-ce qui changeait, elle se le demandait... Emily ne croyait pas au destin, ni avait jamais cru. Ses pas avaient quelque chose d'automatique, mais pas de prévus à l'avance. Elle cherchait des réponses, mais ne les trouveraient pas dans une quelconque fatalité. Donc quoi ? Où chercher ? Avait-elle eu de la chance de rencontrer Azure, ou aurait-il mieux valut qu'elle ne croise jamais son chemin ? Ah. Pour répondre à cette question, elle avait besoin de savoir ce qu'il était pour elle. Elle haussa doucement les épaules, l'air indifférente.

« C'est bizarre. Non ? Peut-être que si tu me tue quand même, tu iras mieux. »

Et dans le regard rouge qu'elle releva vers lui, comme une lueur de défi. Pourrait-il la tuer ? Pourrait-il enfoncer sa lame à travers son corps et la laisser se vider de son sang, que le sable aspirerait ? La mer emporterait son corps, et personne ne saurait rien. Qu'est-ce qui le retenait de le faire ? Quoi ?

[Je me demande si les sangliers ont été irradiés aussi...8D]

Invité

Emily était plusieurs choses aux yeux d'Azure. Avant tout, c'était un gros mystère. Le point d'interrogation principal de sa vie actuelle. Le second d'Hider se posait des questions, très nombreuses, sur la véritable signification de la présence de cette petite démone aux cheveux de jais dans sa vie. Chaque chose, chaque personne a une raison d'être, non ? Sinon, le monde lui même ne serait pas existant. Même si l'existence d'Azure lui semblait parfois vide de sens, il savait qu'il était plus utile à exister que la totalité des habitants des trois autres pays. Pour une raison, simple et évidente. Azure était un Antarr. Et de ce fait, de ce statut, il avait le privilège de servir Melfia Hider aveuglément. Servir la reine donnait son sens à sa vie. Il était aux ordres d'une créature, car il était trop commun de la qualifier de simple personne, une créature supérieure à son imagination et son entendement. C'était comme recevoir une parole divine. Même mieux que cela. Une parole divine, c'était ce que recevait les fous qui ne savaient plus quoi faire de leur existence et qui, influencés par les mensonges racontés par les autres, devenaient persuadés que leur divinité quelconque leur avait confié une mission, toute aussi quelconque. Mais au final, tout ceci n'était que mensonge. La religion est supercherie, Azure le savait bien. La religion n'est qu'un mensonge, tout comme les dieux. Ils ne sont que des icônes crées pour que les faibles aient quelqu'un à adorer en toute quiétude. Cela était pathétique aux yeux du démon pur sang. Il ne souhaitait pas adorer des mensonges. De simples images, conçues par l'imaginaire de gens communs. Et même pas son imaginaire à lui d'ailleurs. Déjà qu'il ne se faisait pas totalement confiance à titre purement personnel (il serait bien capable de s'égorger dans son sommeil, le traître.) alors que dire de sa confiance envers les autres ? Azure n'avait totalement foi qu'en une seule personne, cette 'personne' était la reine. Il savait qu'elle lui donnerait toujours le bon ordre. Pourquoi ? Tout simplement parce que c'était un ordre de Melfia. Et que sa logique, sa façon de penser, tout était au delà de la compréhension d'Azure Kite. Voilà pourquoi il s’exécuterait sans broncher à n'importe quel ordre de la reine. Elle le lui avait donné, elle en avait donc besoin d'une certaine manière. Il pouvait être utile à l'ange Melfia qui gouvernait cette terre. Cette perspective lui suffisait. Il n'avait pas besoin d'autre explication. Pas besoin de mensonges. Sa seule divinité, c'était Melfia. Et contrairement aux autres, Azure avait la preuve de son existence. Melfia était une vraie déesse, elle vivait sur terre avec eux. Pas comme ces faux dieux imaginés par les charlatans.

Emily était un cas plus complexe. Qu'était elle ? Azure ignorait pourquoi, mais il avait une certaine confiance en elle. Pas comme envers... Eh bien, la totalité du monde à l'exception tout à fait normale de Melfia, et à plus petite échelle, la sienne à lui. Emily était donc la troisième dans cette... Pseudo liste de confiance. Azure ne lui aurait probablement pas confié sa vie, mais il ne la tuerait pas si jamais elle venait à être la témoin d'un événement gênant. Il ne lui confierait pas une mission importante, mais savait qu'elle ne lui ôterait pas la vie. Ou qu'elle n'essaierait pas. En tout cas, Azure la plaçait au dessus du commun des mortels, cela était plus qu'évident. Et puis, la présence d'Emily même si elle suscitait beaucoup de questions dans l'esprit d'Azure, lui procurait surtout du plaisir. Il se sentait bien avec elle près de lui. Se sentait encore mieux lorsque leur lèvres se joignaient. Elles le l'avaient fait que peu de fois au final, mais à chaque fois, Azure s'était senti plus heureux qu'il ne l'était habituellement. Était-ce étrange ?

« C'est bizarre. Non ? Peut-être que si tu me tue quand même, tu iras mieux. »

Le second d'Hider posa ses yeux bleus clair sur ceux, rouge sang, de la démone lui servant d'interlocutrice. La tuer... Pour être honnête, d'ailleurs maintenant qu'il était Antarr il n'avait pas trop le choix, il avait déjà songer à tuer Emily. Et il ne trouvait pas l'idée plus choquante que cela, après tout... Elle suscitait des questions chez lui. Et ces questions n'étaient pas très agréables, puisqu'il était incapable d'y fournir une réponse. De ce fait, la tuer n'était pas une solution idiote. En fait, c'était même la solution qu'il aurait adopté si Emily n'était pas aussi... Importante à ses yeux. Il ignorait pourquoi elle l'était, et cette ignorance était ce qui lui donnait envie de la décapiter. Mais avant cela, elle restait importante. On ne tue pas les choses importantes.

« Non. Répondit-il, d'un ton très ferme et assuré. Je n'irais pas mieux si je te tue. Si tu meurs, je serais mécontent. »

Il laissa la mer déposer une vague sur la plage, tandis qu'aucun oiseau n'osa proférer le moindre cri. Puis il poursuivit, d'un ton cette fois plus calme et monocorde.

« Tu es mystérieuse, mais je tiens à toi. Je ne veux pas casser mes trésors, même si je ne sais pas pourquoi ils sont précieux. »

Il resta là, les bras ballants à attendre. Maintenant il voulait qu'elle s'approche de lui. Qu'elle lui réponde de plus près. Sentir son souffle glacial sur sa peau. Cela lui faisait du bien d'être près d'elle. Il voulait se sentir encore mieux.

[Je n'en ai pas la moindre idée.... Autant que les oiseaux sans doute!xD]

» VERRONA Emily {U.C}
» Promenons nous dans les bois, pendant que le Loup n'y est pas...~♥ {Emily Verrona}
» LIE Rywan ▬ « If I don't believe in love, you're getting too close to me »